mardi 18 juin 2013

Alan Wake,

Alan Wake est un auteur à succès de thriller policier. Mais depuis deux ans, il souffre du syndrome de la page blanche. Sa femme Alice décide alors de l'emmener en vacances dans la paisible ville de Bright Falls afin, espère-t-elle, qu'il puisse retrouver l'inspiration et écrire un nouveau livre. Mais lorsque sa femme disparaît, le dernier roman d'Alan, un livre d'horreur qu'il ne se souvient pas avoir écrit, prend vie et une force obscure (l'Ombre) prend possession de la population et de tout autre objet. Alan tente de retrouver sa femme et comprendre ce qui lui arrive.
Mais si la journée, la région est magnifique et la population locale très accueillante, la nuit apporte immanquablement son lot de souffrances, de ténèbres et de cauchemars.
À vous de guider Alan dans sa quête de lumière.
Résumé sur Wikipédia.
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Les balades en forêt sont toujours superbes : le soleil illumine les feuillages, la pluie les fait chanter, les divers chemins donnent cette vision d’infini et courir entre les troncs donnent un pur sentiment de liberté. Mais la nuit, sans la moindre lumière ? Tout d’un coup, cela devient un vrai background de film d’horreur. Et c’est dans ces parcours du combattant macabres que le joueur accompagne (malheureusement) l’écrivain torturé Alan Wake.
Alan Wake, c’est un jouissif thriller en jeu-vidéo qui s’inspire des meilleurs classiques de l’horreur : on pourrait même parler d’hommage à Stephen King tant les clins d’œil sont nombreux (Le jeu commence d’ailleurs sur une citation de Stephen King qui est : « Les cauchemars ne relèvent pas de la logique, et les expliquer n’aurait aucun intérêt ; ce serait contraire à la poésie de la peur. ») Vous vous en doutez, grande admiratrice du King que je suis, c’est un des points qui m’a attiré chez ce jeu. Mais pas seulement ! Alfred Hitchcock a droit aussi à ses références, tout comme Lovecraft et même Tolkien, où l’Œil de Sauron serait ironiquement une aide précieuse aux habitants de Bright Falls dans ces ténèbres. Bref, le jeu a tout pour plaire de ce côté-là.


Déjà, le jeu tient ses premières promesses par le biais de cette ambiance (pas trop) champêtre : la peur assaille à chaque tombée du jour. J’étais particulièrement angoissée en explorant les bois aussi vastes et les ombres aussi denses avec cette ridicule lampe de poche, je serrais les fesses à chaque tournant tant je craignais qu’un bûcheron possédé ne me saute dessus, pire, qu’un tracteur n’essaye de m’écraser. Je ne suis pas particulièrement sensible au noir, je n’en fais pas du tout une phobie mais le rendu est si réussi dans Alan Wake qu’on finit par comprendre le calvaire des nyctophobes minuit passé. On rajoute à la recette des musiques efficaces et un système sympa quoique basique. Malheureusement, à force d’utiliser les mêmes ingrédients, les courses poursuite finissent pas être lassantes et je n’ai retenu que le côté frustrant (le genre de moment où on est à deux pas d’un lampadaire mais un hache nous achève avant d’atteindre le refuge). Je reste cinq minutes sur le gameplay qui m'a un peu dérangé : le plan de caméra y est pour quelque chose car il est toujours de côté et le temps d'habituation a été assez rude pour moi, tout comme les effets écho quand on change de direction. Je ne préfère même pas parler des scènes avec les voitures, juste qu'avec moi, elles illustrent très bien les problèmes d'alcool d'Alan Wake.


Pourtant à côté de ça, le scénario est très bon. Je ne dirais pas extraordinaire mais très bon quand même. Les mystères sont bien gardés et les rebondissements efficaces, je regrette juste cette fin qui a des relents d’inachevé malgré les deux chapitres bonus (Le signal et l’Écrivain). D’autant plus qu’un Alan Wake 2 est déjà prévu mais qu’il n’arrivera pas avant… Un certain moment (« prévu en temps voulu » selon les développeurs, j’ai peur de ce qu’ils peuvent sous-entendre là-dedans). Il y a tout de même des passages assez intenses que j’ai adorés au point de vouloir les recommencer, je pense surtout au chapitre 4, qui est très rock’n’roll ([spoiler du chapitre 4] il faut quand même imaginer : se battre contre des possédés sur une scène à l’abandon avec des symboles vikings construite par de vieux bikers metalleux et passionnés. Honnêtement, c’était pour moi le meilleur moment[/spoiler]).


Mais un scénario est surtout porté par ses personnages et, même l'éventail est correct, il est dommage que certains manquent un peu de fond. J’ai beaucoup aimé Alan Wake en lui-même déjà, écrivain torturé et cynique, fatigué par son métier et au tempérament violent. Les développeurs vont jusqu’à le décrire clairement par un bref "he’s kind of a dick" (= Alan est un peu (beaucoup) un connard, dans ma traduction perso') mais rajoutent que c’est une bonne chose et je ne peux qu’être d’accord : cela fait de lui un protagoniste que l’on est pas obligés d’aimer. Ses défauts (logiques, au passage vu sa popularité) le rendent donc plus humain, plus réaliste et même si il reste kind of a dick, je me suis attachée au personnage. J’ai beaucoup aimé son meilleur ami aussi, Barry Wheeler qui ajoute un côté comique à l’histoire sans être lourd (et sans mauvais jeu de mots de ma part), tout comme Sarah Breaker, les deux frères Anderson et même certains antagonistes qui sont assez réfléchis.

Sérieux, à quand un opus sur Barry Wheeler ?

Quant à la femme d’Alan, Alice Wake, j’ai surtout regretté son manque de présence, faisant surtout figure de « belle demoiselle en détresse » car dans le fond, elle est bien sympa. En fait, si j’ai adoré Alan et Alice chacun de leur côté, j’ai eu du mal à accrocher à leur relation car on entend différents sons de cloche à ce propos : un coup c’est un couple malheureux qui traverse beaucoup de difficultés et ne s'accordent pas, ensuite c’est le couple le plus heureux et en osmose totale… Bref, j’ai trouvé ces descriptions peu claires et mal maîtrisées, mal représentées. Surtout comparé à un autre couple [spoiler concernant le dernier chapitre]qui est celui de Thomas Zane, le poète et sa muse, Barbara Jagger. Ici on sentait un véritable amour et le fait que Barbara Jagger revienne possédée par l'Ombre Noire et que Tom Zane remarque cette transformation et tente d’y remédier, j'ai trouvé ça très beau. Bref, leur relation est bien plus belle que celle des Wake à mes yeux[/spoiler du dernier chapitre], peut-être aussi à cause de la musique de The Poet and the Muse qui les accompagne.
Allez, laissez-vous charmer.

Et justement, à propos de la bande son, il s’agit bien de la grande qualité de ce jeu selon moi. Alan Wake sert donc une Original Soundtrack qui mélange des morceaux d’instrumental ou des titres de groupes. Les premières, celles servant à l’ambiance sont très agréables même si discrètes, mais les réentendre dans le MP3 est un pur régal. Quant à celles qui concluent les chapitres, qu’on entend dans les radios… c’est carrément orgasmique. Eargamisque. Des morceaux très bien choisis, des découvertes très sympa avec entre autres Among the Oak & Ash (titre du morceau dans le jeu, Shady Grove), Anomie Belle (titre du morceau dans le jeu, How Can I Be Sure) et cerise sur le gâteau, beaucoup de contributions du groupe finnois Poets of the Fall. Les trois musiques War, the Poet and the Muse et Children of the Elder God sont de vrais coups de cœur. Sans mentir, je regrette de ne pas pouvoir écouter les trois en boucle en même temps. Et détail que j’ai aimé, le groupe s’est prêté au jeu en jouant eux aussi un rôle ! Deux de leurs chansons sont donc, dans Alan Wake, supposément chantées par le groupe fictif des deux bikers, Old Gods of Asgard. Bref, j’ai adoré et c’était très sympa de leur part.


Pour rester dans l’esprit sonore, un petit mot sur le doublage qui est, là aussi, réussi. Sans compter que les pages de manuscrit sont lus par le doubleur d’Alan Wake, donnant au jeu un petit côté audiobook agréable. Forcément, la qualité du doublage a énormément d’importance. Je n’ai pas essayé cependant d’écouter la version française, mais Benoît Allemane faisant parti de l’équipe (celui qui a doublé Sherlock Holmes dans les jeux précédents dans la série), cela me rend suffisamment curieuse.


Alan Wake est donc un excellent jeu qui tient ses promesses et rend hommage au genre horrifique. Unique dans son genre de jeu-livre thriller fantastique mais trop répétitif dans son gameplay. Il s’agit quand même d’une expérience mémorable et je croise les doigts pour que les développeurs ne se fassent pas prier trop longtemps pour nous offrir une suite digne de ce nom, car les questions restent nombreuses et il ne reste aux fans que des spéculations et des théories qui peuvent être travaillées.
Sur ce, il ne me reste plus qu'à vaincre la difficulté "Cauchemardesque".

Alan Wake ou comment être aussi populaire que son idole, ce n'est en fait pas drôle du tout.

             Quelques anecdotes sur ce jeu,
• J’ai noté pour la date de sortie 2012 dans le petit cadre au début de l’article. C’est à moitié vrai : Alan Wake est en réalité sorti en 2010 mais uniquement sur Xbox et a été réédité en 2012 pour nous autres, gamers PC.
• Les fins connaisseurs me diront qu'une suite est sortie sous le titre d'Alan Wake's American Nightmare. Ils ne sont pas si connaisseurs puisqu'il s'agit plus d'un spin-off que d'une véritable séquelle. L'ambiance m'intéresse moins (plus un décor red-neck et aux couleurs psychédéliques loufoques) mais je m'y pencherai quand même un de ces quatre.
• Comme dit plusieurs fois dans cette chronique, Alan Wake est un jeu qui s’inspire en grande partie des œuvres de Stephen King. Loin d’être du bête copié-collé, les développeurs rendent surtout hommage grâce aux nombreuses références. Ainsi, les nombreuses traversés en forêt peuvent rappeler La Petite Fille qui Aimait Tom Gordon. Bien que le scénario de déroule dans l’état de Washington (selon certaines interviews), l’ambiance très canadienne côtoie la tranquillité des villes que l’on peut retrouver au début des livres de Stephen King. Alan Wake, à force d’être assailli par des bûcherons armés de haches, se sent comme une Wendy effarouchée de Shining (enfin, ça tient plus du film que du livre pour le coup…). N’oublions pas non plus que dans les œuvres du King, il y a régulièrement un écrivain qui souffre du syndrome de la page blanche, tout comme Alan Wake. Cela va même plus loin puisque les pages du manuscrit récupéré prennent le même ton que celui de la plume du King. Sans compter qu’Alan Wake délire plusieurs fois, certain qu’écrire sauvera la vie de beaucoup, tout comme la résurrection de Misery pourrait sauver la vie de Paul Sheldon dans Misery. De plus, les questionnements sur sa propre œuvre maléfique et les doutes rappellent les étranges événements de La Part des Ténèbres avec la double identité de Thad Beaumont et George Stark. Bref, la liste n’est pas finie mais vous comprenez les nombreux clins d’œil qui font référence à l’univers du Papa de Ça.
• Si les connaisseurs en cinéma finnois (vous êtes nombreux ?!) voient un petit air de déjà vu chez Alan Wake, c'est normal : l’acteur Ilkka Villi s’est gentiment prêté au jeu en incarnant l’écrivain torturé pour le jeu et même pour le clip War de Poets of the Fall.
(je dois pourtant vous avouer que Alan Wake me fait plutôt penser à Al Pacino...)


• Sans mentir, allez dans la forêt la nuit (ne serait-ce qu’en voiture) et éteignez la lumière, vous ferez moins les malins.

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