mercredi 25 janvier 2017

Casanova et la femme sans visage, d'Olivier Barde-Cabuçon,

Après avoir sauvé Louis XV de la mort lors de l’attentat de Damiens, et malgré son peu de goût pour la monarchie, le jeune Volnay obtient du roi la charge de « commissaire aux morts étranges » dans la police parisienne. Aidé d’un moine aussi savant qu’hérétique et d’une pie qui parle, Volnay apparaît comme le précurseur de la police scientifique, appelé à élucider les meurtres les plus horribles ou les plus inexpliqués de son époque. Épris de justice, c’est aussi un homme au passé chargé de mystère, en révolte contre la société et son monarque qu’il hait profondément.
Lorsque, en 1759, le cadavre d’une femme sans visage est retrouvé dans Paris, Volnay doit conduire une enquête sur le fil du rasoir avant que le meurtrier ne frappe de nouveau. Mais entre des alliés aussi incertains que le libertin Casanova et des adversaires redoutables, à qui le commissaire aux morts étranges peut-il se fier ?
Quatrième de couverture par Babel, Babel Noir.
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« – Et à qui accordez-vous donc votre confiance ? s’amusa-t-elle à lui demander.
– À personne, madame, en dehors de mon collaborateur et de ma pie. C’est un bel oiseau et qui sait parler en français comme en latin. Il vous ravirait.
Elle le considéra avec surprise puis haussa négligemment les épaules.
Les livres, un oiseau savant, un moine hérétique qu’on a failli brûler et des cadavres. Voilà donc tout son monde ? »
P. 225

Les couvertures de Babel possèdent toujours un charme auquel je suis sensible, de plus, j’ai aperçu cette série sur Cellardoor. J’avais besoin d’une critique positive d’un blog que je suis, car belles couvertures ne riment pas toujours avec perle littéraire (Le Diable danse à Bleeding Heart Square reste un de mes exemples personnels) et je me suis donc lancée dans la première aventure de ce Commissaire aux Morts Étranges !

Déjà, si je suis une mordue du XIXème siècle et du Moyen-âge, je suis bien moins à l’aise avec le XVIIème et XVIIIème siècle (en plus d’avoir une petite appréhension pour les Lumières depuis le collège mais que je soigne avec du recul). Ces deux siècles fortement connectés dont on retient les capes, les épées et les perruques poudrées ont bien plus à offrir que des mouches aux coins des lèvres et des français qui empestent le parfum (cliché étranger oblige). Et j’ai été ravie de voir qu’Olivier Barde-Cabuçon dresse ce décor très riche autour de son enquête macabre, car si Versailles brillait même après la mort de Louis XIV, les malheurs étaient aussi nombreux que les mystères et l’histoire de la criminologie compte des affaires sordides à cette époque.


J’avais évité de lire des critiques trop en détails pour garder le plus de mystères, mais ironiquement, je m’étais construit une autre image de ce qu’est cette série du Commissaire aux Morts Étranges : j’imaginais plus un thriller, j’imaginais plus de surnaturel, j’imaginais plus de gore. Finalement, cette première enquête reste assez rationnelle et fréquente les cercles de l’alchimie, mais elle est bien plus terre-à-terre que les romans de Sire Cédric, par exemple. Une fausse idée ancrée qui a provoqué des attentes déçues, je saurai pour mes prochaines lectures puisque j’ai la suite en poche. (dans les deux sens, jeu de mots, hin hin)
Quant aux côtés gore, malgré le titre, Casanova et la Femme sans Visage devrait être à la portée de tout le monde à moins de posséder vraiment une âme sensible : Barde-Cabuçon n’en fait pas trop et évite de s’adonner dans le violent le plus vulgaire.
Le livre n’empêche pas de dormir : on s’intéresse bien aux crimes et non pas au sang que les victimes laissent.

Casanova et la Femme sans Visage est sans conteste un roman policier donc, et un bon : l’enquête piétine pour avancer avec tous ses nœuds d’énigmes tant elle est fournie. Plus que des meurtres, il y a des complots, des espions, des secrets à dévoiler, des suspects… On fait marcher nos méninges aux côtés de Volnay. Et bien sûr, tous ces ingrédients sont accordés au contexte historique : l’auteur extrait tout le potentiel de 1759 et offre une enquête délicieuse sur un plateau style Louis XV.

Quant au style de la plume, Barde-Cabuçon n’en est pas à son premier roman mais j’ai noté quelques lourdeurs. Pas tant au niveau de la narration, mais il y a de nombreux chapitres et ils sont ouverts par une citation, citation qui est insérée dans le chapitre concerné : qu’elle soit greffée comme ça aux dialogues (surtout que la plupart sont dites par le vrai Casanova et donc transposées chez le Casanova fictif), il y avait une impression forcée et certaines répliques n’étaient pas nécessaires, créant une lourdeur alors que les mentionner au début du chapitre aurait suffi.
Après, n’étant pas fan des hommes à femmes, Casanova ne m’a pas charmée plus que ça, lui préférant cent fois le Commissaire Volnay : à la fois jeune et vieux dans son tempérament calme mais rongé par des sentiments purement humains dont il ne sait que faire, le commissaire est quelqu’un de très intéressant et on découvre son histoire au fur et à mesure.
Ceci dit, la palme d’or du personnage préféré est définitivement décernée au moine hérétique. Et Dieu sait que j’ai un faible pour les membres du clergé hérétiques.

Un bon policier qui s’installe parfaitement dans le contexte historique choisi et qui trempe dans les sciences occultes, faisant la part pour plaire aux lecteurs attirés par le rationnel ou le surnaturel. Je n’ai pas eu un coup de cœur marquant en raison d’un milieu un peu longuet (par contre, la fin a été lue presque d’une traite), mais je suis contente d’avoir la suite et je la lirai en sachant à quoi m’attendre désormais.

Avec la couverture et pour faire écho au titre, je valide l’idée 57 du Challenge des 170 Idées :

             Quelques anecdotes sur ce bouquin,
• J’ai été déçue de ne voir aucune note en bas de page, mais l’attentat mentionné a bel et bien eu lieu : si je n’ai pas eu d’informations dans Casanova et la Femme sans visage, j’ai découvert cet événement (après ma lecture) en lisant une biographie de Voltaire et je partage l’anecdote car je ne pense pas que ce fait soit bien connu. Robert-François Damiens a projeté un attentat contre le roi Louis XV (déjà très impopulaire, le roman de Barde-Cabuçon le fait bien comprendre) le 5 janvier 1757 qui a échoué, bien que le roi fût blessé. Mais ce n’est pas tant l’attentat qui a choqué mais l’exécution de Damiens, car il a été le dernier condamné à mourir par l’écartèlement en France, supplice qui n’avait pas été appliqué depuis plusieurs années. Forcément, les gens ont montré leur désapprobation, notamment Voltaire et d’autres philosophes.
[ci-contre, son portrait lors de son jugement, il fallait lui donner un air très méchant visiblement...]



6 commentaires:

  1. Ohla, oui ! Si tu t'attendais à une ambiance à la Sire Cédric, tu as dû être bien déçue, c'est clair ! ça n'a absolument rien à voir ! :) Pour tout te dire, cet univers me correspond d'ailleurs bien mieux que celui de Sire Cédric (même si j'aime beaucoup ce dernier aussi ^^).

    Casanova me m'a pas plus charmée que ça non plus mais je suis une inconditionnelle de Volnay et du moine hérétique qui te réservent encore bien des surprises, tu vas voir !

    Mon préféré de la série est le second volume, Messe Noire. Je l'ai lu très très vite ! Je trouve que les deux derniers tomes en date sont moins palpitants et certaines choses m'agacent un peu à la longue mais je n'en reste pas moins convaincue par l'intérêt de ces policiers historiques. Je crois qu'un nouveau volume sort en mars (ou au printemps en tous cas). Ce sera le 6ème si je ne me trompe pas !

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    1. C'est la faute aux couvertures ! xD Elles ont une ambiance assez "surnaturelle" où on voit presque des figures démoniaques et comme je ne voulais pas lire trop en avant des critiques, je n'ai pas vu le côté occulte plutôt qu'horreur irréelle.

      Ah ça fait plaisir ! J'ai le tome 3 (que j'avais trouvé en librairie, il manquait les deux premiers), il me manque donc Messe Noire mais il faudra que je parte à sa recherche. C'est vrai que je ne me vois pas les empiler tous à la suite car je frôle toujours l'overdose... ça me permet de respirer et mieux apprécier les tomes, donc si la qualité baisse un peu, ce sera encore plus primordial !

      Et après petite vérification sur Wiki, effectivement, Entretien avec le diable est le cinquième... ça me fait de la lecture, ça va xD
      Non mais après, ça change des classiques Nicolas Le Floch et compagnie, il y a cette pointe d'originalité que j'apprécie.

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    2. Ah oui c'est pas faux ça, les couvertures ont un côté un peu inquiétant/surréaliste qui peut induire en erreur.

      Mais je t'avoue qu'à l'origine, j'avais lu en détails la critique que Zofia avait fait sur le tome 1. Du coup, je ne m'étais pas sentie surprise par la tournure des événements. Après je comprends tout à fait que tu te protèges des mots des autres par soucis de préserver ta vision de l’œuvre avant lecture... Parfois, ça peut néanmoins aider à ne pas avoir d'attentes décalées.

      Mais bon, à voir si la suite te plait ou pas ! :D Tu auras tout à fait le droit de ne pas accrocher bien que j'avoue que je suis tout à fait conquise pour ma part. J'aime l'époque et les personnages... et les enquêtes sont plutôt bien menées.

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  2. J'avais bien aimé cette lecture ! je ne suis pas non spécialiste du 16 et 17ème siècle mais j'ai trouvé que l'auteur rend bien le contexte historique et en fait quelque chose de vivant.
    Cellardoor m'a depuis dépassée ;-) mais j'ai aussi la suite qui m'attend !

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    1. Elle est tellement intenable aussi D: Celladoor nous enterrera tous avec ses lectures !

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    2. J'avoue que pour cette saga, je n'ai pas fait dans la demie mesure... :D Je l'ai littéralement dévorée mais j'en ai vraiment été heureuse tu vois. J'ai adoré m'y plonger même si avec du recul, j'aurais peut être du me calmer un peu et prendre mon temps !

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