dimanche 31 mars 2013

Bilan Mensuel : Mars 2013 [10],


Même si je suis peu friande des fleurs saturées de pollen et des allergies provoquées, je suis ravie néanmoins d’accueillir le début du Printemps avec ses gros orages violents et ses belles journées encore douces. D’autant plus que c’est le dernier mois où je m’autorise un peu de glandage bienheureux comme le mois d’Avril sera surtout concentré au niveau des révisions, alors forcément, j’en ai très bien profité. 
Mes lectures du mois sont donc :
(cliquez sur les couvertures pour accéder aux chroniques disponibles)

Comme les cartes personnages (qui aident à se repérer dans le tome) du Trône de Fer me prennent beaucoup de temps, la chronique de ce tome 3 n'arrivera sûrement qu'en fin-Juin. Bien entendu, elle sera sans spoil et servira à ceux qui viennent de terminer le tome 2.

Et les achats que j’ai pu m’autoriser :
(Et oui, enfin La Pucelle et le Démon !)

Un mois donc très agréable. Et avec les derniers invités de ma PAL, le mois d'Avril et Mai sentent bon le fantasy !

Je souhaite à tous un excellent mois d'Avril... Et les étudiants, n'oubliez pas d'ouvrir vos manuels pour ne pas accumuler les retards~

lundi 25 mars 2013

Contes Fantastiques des Pays Celtes, de Gérard Lomenec’h,

Tous les représentants du monde fantastique ont rendez-vous avec les rêveurs de chimères celtiques: géants d’Irlande, elfes danseurs, banshees, mais encore les cluricaunes faux-monnayeurs, follets d’Écosse et autres femmes cygnes. Aussi ne s’étonne-t-on pas que Shakespeare ait puisé à ces sources, et que Walter Scott emprunte aux traditions des Highlanders ses récits les plus dramatiques. L’amour du surnaturel était très vif chez les Gaëls et les Bretons. La mythologie celtique est riche en divinités des eaux, mermaids, merrows et autres kelpies. Comme au temps des Thuatha De Danann, géants, sorcières, animaux monstrueux et prodiges de toutes sortes hantent la nuit les routes, les carrefours et les lacs. Irlandais et Gallois se figent à l’évocation des duitahans, personnages décapités qui viennent de l’Autre Monde. De toute façon, on évitera d’errer dans la campagne la veille du 1er mai au risque de se voir enlever par les Fairies. Pour s’en rendre invisible, il faut être assez favorisé du hasard et posséder un trèfle à quatre feuilles…

Rassemblés et présentés par Gérard Lomenec’h, ce recueil propose plus de soixante-dix contes issus de la tradition des sept pays celtiques où se mêlent l’étrange, l’effroi et le mystère…
Quatrième de couverture par Terre de Brume.
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Kelpie sous sa forme féminine, par Herbert James Draper (1913)
« - […] vous ne seriez pas Jack Myers, qui s’est noyé il y a sept ans au gué d’Ah-na-Fourish ?
- Supposez que je le sois, répliqua-t-il ; un homme n’a-t-il pas le droit de se noyer en face de sa maison le jour qu’il lui plaît, depuis le dimanche matin jusqu’au samedi soir ? »
P. 218

Je pense que je ne me lasserai jamais des mythes et des légendes celtes, bien qu’il serait plus agréable de les entendre dans un pub ou au coin d’un feu au lieu de les lire en solitaire. Malgré cela, j’ai passé un très bon moment en compagnie de Gérard Lomenec’h avec les récits fantastiques qu’il nous sert dans Contes Fantastiques des Pays Celtes.

Déjà, j’ai beaucoup aimé la présentation du livre : divisé en cinq chapitres, Contes Fantastiques des Pays Celtes propose des nouvelles réunies par thème avec en introduction un petit aperçu de ce qui suivra. En bonus, complément de vocabulaire, explications de certaines croyances, précisions sur les nouvelles… C’est pourquoi je divise cette chronique en cinq parties aussi et je réserverai une sixième partie pour la conclusion pour une impression globale du recueil :

Midsummer Eve, par Edward Robert Hughes (1908)

Le Chapitre I est consacré aux êtres les plus populaires : les Fairies ou les elfes espiègles avant que Tolkien ne les transforme en êtres divinement beaux et gracieux. Cela dit, malgré la popularité d’Arwen, Galadriel ou Elrond, la plupart des curieux savent que les elfes étaient également des lutins farceurs, des fées minuscules, etc. Forcément, je n’ai pas eu beaucoup de surprise au cours de la lecture de ce premier chapitre et je l’ai même trouvé assez monotone. En revanche, j’ai eu un énorme coup de cœur pour la légende de Thomas Le Rimeur, nommée Thomas le Rimeur et la Reine des Elfes (Irlande)* dans Contes Fantastiques des Pays Celtes. J’ai découvert ce mythe l’an dernier en tombant sur une musique composée par Cécile Corbel qui se nomme The King of the Fairies. J’avoue que je préfère cette version lyrique, plus poignante et plus conservatrice (dans l’ouvrage Contes Fantastiques des Pays Celtes, je trouve que le nom de Reine des Elfes porte à confusion à cause de l’image qu’on a désormais des elfes depuis les ouvrages de Tolkien, Fairies est selon moi un thème plus fidèle). Attention cependant à ne pas confondre la mésaventure de Thomas le Rimeur avec celle du chevalier dans La Belle Dame sans Merci : les deux légendes se ressemblent beaucoup mais chacune à sa magie propre.

Thomas The Rhymer, par Thomas Canty

J’ai beaucoup aimé Les Elfes Danseurs de Cae-Caled (Pays de Galles) aussi, pour son côté légèrement terrifiant, tendant vers les frayeurs d’enfant.
* Contes Fantastiques des Pays Celtes désigne Thomas le Rimeur et la Reine des Elfes comme étant un conte irlandais, or j’en doute puisque Thomas le Rimeur était un poète écossais et que la plupart des sources désignent ce conte comme étant d’Écosse à la base.
Le Chapitre II aborde des créatures moins connues du folklore celte : les êtres de l’eau. Il y a bien sûr les sirènes (ou pour respecter les origines irlandaises et écossaises : les merrows), à la différence que ce peuple marin possède des chapeaux rouges qu’un mortel peut dérober pour visiter leurs villes sous la mer sans risque la noyade. Mais il y a aussi les redoutables kelpie, les nuckelavee et les îles qui disparaissent et réapparaissent à différentes époques. Forcément, ce chapitre était plus agréable car avec plus de découvertes, plus de diversité. On passe de légendes touchantes sur des métamorphoses, comme La Truite Blanche (Irlande) à des contes mythologiques comme La Légende de Tamara (Cornouailles) qui racontent les origines fantastiques des rivières Tamar, Tavy et Tawr près de Plymouth.

La rivière Tamar serait à l’origine une nymphe du nom de Tamara qui avait pour amants deux frères géants Tavy et Tawrage.

D’autres légendes touchent à un aspect géographique comme La Ville Engloutie (Gallice) et Le Château Suspendu dans les Airs (Bretagne)… Quoique pour ce dernier, bien que très sympathique et digne à être raconté, je n’ai pas trop compris pourquoi il était placé dans le chapitre concernant Les Créatures de la Mer puisqu’il y a très, très peu de rapports ?
Sans oublier les nouvelles plus brèves mais toujours très agréables comme Le Vieillard de Corentin (Cornouailles) et La Mermaid (Îles Shetlands) qui est mémorable grâce à la réplique finale de la mermaid de cette courte nouvelle.

Un Kelpie dans sa forme réelle, par Tygwa sur DeviantArt
Le Chapitre III, Des Temps Aventureux est digne des légendes grecques de l’Antiquité : ce genre d’histoires avec des retournements de situation complètement incongrus et qui semblent pourtant bien normal pour le narrateur et ses personnages. Mais malgré quelques situations un peu tirés par les cheveux (où le narrateur vous prend aussi franchement pour un con), deux nouvelles m’ont énormément plu : celle des Douze Oies Blanches (Irlande) et La Demoiselle-Biche (Gallice). La dernière se finit en fait très mal et ça fait plaisir (excusez le terme) car la plupart des contes connaissent des happy ending : sauf que les fins tristes, quand c’est bien mené comme dans La Demoiselle-Biche, ça se refuse pas.

Le Chapitre IV est, sans surprise, un de mes préférés puisqu’il s’intitule Cohortes de la Nuit. Ou plus franchement : légendes à raconter durant un soir d’Halloween. Évidemment, les Banshee sont ici abordées, mais pas que ! Les démons sont aussi invités, les fantômes et le très populaire Cavalier sans tête fait même une apparition. J’ai beaucoup aimé Le Maître et son Élève (Irlande) qui est assez hilarante (Béelzébuth qui fait rire, c’est assez extraordinaire). D’autres font quant à elles un peu plus flipper, comme Le Fantôme de Gloddaeth (Pays de Galles), lu à minuit, c’est sacrément efficace ! La Légende de la Banshee (Irlande) aussi m’a plu, bien que classique et enfin, Le Doreur et le Diable (Bretagne) dont la fin était très bien trouvée.

Halloween, artiste inconnu

Et enfin, le Chapitre V qui se nomme l’Or du Temps qui a un thème moins évident que les autres mais qui regroupe des légendes plaisantes. Le Puits aux Têtes d’Or (Écosse) est celle que j’ai préféré car j’ai l’impression qu’elle divulgue discrètement une petite morale de fin où les notions de bien et de mal, gentil et méchant sont très relatives au bout du compte.

En somme, Contes Fantastiques des Pays Celtes est un recueil qui souffre d’une certaine monotonie mais il y a quelques perles que je retiens encore. Il permet de découvrir des mythes et des créatures symboliques oubliés et le lecteur étranger peut donc se familiariser avec les légendes des contrées celtiques.

             Quelques anecdotes sur ce bouquin,
• Gérard Lomenec’h est avant tout musicien et musicologue.
• Fnac nous ment en affirmant que les tirages sont épuisés, par chance, l'ouvrage est toujours disponible sur le site des éditions Terre de Brume.
En bonus, King of the Fairies par Cécile Corbel →
À savoir cependant qu'il existe beaucoup de morceaux celtiques nommés King of the Fairies

War of the Roses,

Après nous avoir permis de dézinguer des tripotées de cow-boys dans le sympathique Lead & Gold, voilà que les Suédois du studio Fatshark remballent leurs colts pour dégainer épées et masses d'arme. Les bougres nous invitent en effet à ensanglanter les vertes campagnes de l'Angleterre du XVème siècle au travers d'un titre multijoueur extrêmement exigeant. Âmes sensibles, s'abstenir.
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Si certains joueurs sont de vrais passionnés de FPS, jeux de guerre et intenses matchs entre soldats bien américains, de mon côté, je n’ai jamais vraiment été attirée par ces simulations de guerre moderne. Par contre, si on touche à une guerre historique aussi marquante que la Guerre des Deux-Roses comme le fait aussi bien Fatshark, les développeurs ont alors toute mon attention.

Mêlant habilement action et historique, War of the Roses, c’est bien plus qu’un jeu où on se court après avec des épées et des lances. Les graphismes sont loin d’être renversants, c'est vrai : les cartes sont tout juste correctes, les armures bien rendues mais sans plus et les personnages ressemblent clairement à des marionnettes. Par chance, quand on est pris par une bataille, on ignore ce genre de défauts graphiques et on finit par les pardonner, d’autant plus qu’on ressent le travail de recherches mené par la team derrière : armes élaborées, armures respectées et ambiance installée, on retrouve même le nom des instruments de guerre qui aideront à défendre notre camp :

Images de ma partie personnelle.

Il en va de même pour l’histoire des Lancaster et des York. Déjà, il est possible de changer de camp même en pleine bataille (si vous êtes assez fourbe, vous pouvez, à la fin d’une manche, rejoindre l’équipe gagnante juste pour vous faire passer pour la saloperie de service. À savoir qu'une défaite ou une traitrise ne modifieront pas vos points gagnés). Votre tenue est alors assortie à votre groupe mais heureusement, les noms de vos coéquipiers sont aussi en couleur, histoire de ne pas vous perdre (avec le plus basique : rouge, les méchants, bleu, vos copains). Mais pas que ! À chaque chargement, le jeu se permet des petits cours d’Histoire rapide et concret qui nourriront votre culture, tout comme les objectifs de certaines batailles. Après, si vous voulez juste jouer les bourrins et être ici uniquement pour frapper vos adversaires, vous avez simplement à ignorer les paragraphes…

Images de ma partie personnelle.

Concernant la jouabilité des batailles, je râle un peu sur ce point : sans être une novice totale, il m’a fallu un certain temps pour m’en sortir et me repérer au niveau des touches. Les combats sont très hasardeux et demanderont plus de technique que d’autres jeux : les premières heures marquent de véritables souffrances (vous commencez en péquenot quand même) mais par chance, les points se gagnent rapidement au début et les pièces tombent dans votre poche. L’argent ici sert à améliorer le personnage : personnellement, j’ai été très heureuse de pouvoir personnaliser mon chevalier, choisir ses armes, ses capacités et son apparence… Mais la cerise sur le gâteau, c’est de pouvoir faire son propre blason !

Images de ma partie personnelle.

Et un brave paysan du site officiel.

Le jeu devient alors plus aisé au fur et à mesure et chaque bataille reste toujours un pur plaisir avec un gros mixte d’émotions. Rage, jalousie (pour les plus belles armures et les cavaliers), bonheur, fierté… D’autant plus que les joueurs même les plus inconnus sont relativement sympas et que, pour les plus timides, le chat n’est pas tellement un moyen tant utilisé (Cela s’explique aussi : quand un chevalier est à terre avec son armure imposante, impossible de se relever, vous gagnez des points si vous allez l’aider). Il existe une certaine diversité aussi : combats à mort, batailles réfléchies avec des objectifs, entraînements et même des joutes !

Images tirées du site officiel

War of the Roses est donc un jeu qui fera le bonheur des passionnés de chevaliers, de guerres médiévales et de violence barbare sur musique entraînante. Le seul hic : c’est qu’il est impératif d’avoir une connexion internet et que les points/sous ne se gagnent pas en mode entraînement. Les plus timides devront donc vaincre leurs craintes mais honnêtement, même si c’est plus drôle de jouer à plusieurs, les parties restant toujours très agréables… Jusqu’à ce qu’un ennemi vienne vous décapiter à coups de bouclier.

Image tirée du site officiel. OUI. POUR LES JOUTES.

             Quelques anecdotes sur ce jeu,
• Certaines images dans les planches sont reprises de l’excellent film Sacré Graal !, évidemment, il n’est pas nécessaire de l’avoir vu pour comprendre le jeu (Sacré Gral ! Parodie les légendes arthuriennes et War of the Roses se concentre dans la réalité du XVème siècle en Angleterre).
• À sa sortie, le jeu s’appelait simplement War of the Roses, désormais, il n’existe plus que la dernière version (sortie en ce mois de Mars 2013) War of the Roses: Kingmaker. Elle comprend bien sûr la base du jeu et les dernières additions qui sont de nouvelles armes, armures et maps/cartes.

Et pour la petite private joke : tu es moche, soldat belge !

vendredi 22 mars 2013

Nord et Sud, d'Elizabeth Gaskell,

Après une enfance passée dans un village riant du Hampshire, Margaret Hale, fille de pasteur, s’installe dans une ville du Nord. Témoin des luttes entre ouvriers et patrons, sa conscience sociale s’éveille. John Thornton, propriétaire d’une filature, incarne tout ce qu’elle déteste : l’industrie, l’argent et l’ambition. Malgré une hostilité affichée, John tombera sous son charme.
Quatrième de couverture par Points.
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« - […] Vous ne connaissez pas le Sud, Mr Thornton », conclut-elle, avant de retomber dans un silence délibéré, furieuse contre elle-même d’en avoir trop dit.
« Me permettez-vous de dire que vous ne connaissez pas le Nord ? » fit-il avec une indicible douceur dans le ton. »
P. 132

Il suffit de regarder mes Souvenirs Littéraires pour voir qu’il y a déjà quelques classiques que j’ai dévoré, tel que Basil, tel que Jane Eyre et d’autres encore. Ces récits qui ont survécu à tant de décennies arrivent à m’emporter dans leurs années qui me font rêver. Ces livres sont mieux que des billets de train à mes yeux, mieux que des tickets d’avion quand la plume est capable de me faire voyager. C’est pourquoi je ne m’attendais pas à ressentir une telle déception en terminant Nord et Sud d’Elizabeth Gaskell.

Adaptation par la BBC (voir Quelques anecdotes sur ce bouquin pour plus de détails)

J’ai rapidement abandonné Orgueil et Préjugés tant la romance n’est pas mon domaine de prédilection (malgré mon coup de cœur pour Nid de Gentilhomme de Tourgueniev) et malgré les points communs qui réunissent l’histoire d’Austen et celle de Gaskell, je me suis quand même jetée à l’eau surtout parce que Gaskell semblait traiter davantage des conditions de vie de cette époque, abordant la fameuse confrontation du Nord et du Sud. Or, sans pour autant accuser Elizabeth Gaskell de publicité mensongère, je me suis rendue compte que les informations étaient relativement pauvres et l’atmosphère assez maladroitement installée. Je voulais des détails, des descriptions mais Nord et Sud se contente d’évidences : prenez un natif de Saint-Paul-de-Vence et embarquez-le à Paris, il fera certainement des commentaires sur la vie précipitée de la ville, la pollution de l’air et j’en passe. C’est le même schéma qu’on suit avec la famille Hale qui part de Helstone pour Milton. Quant aux conditions de vie, le récit se montre aussi logique que s’il comparait le quotidien d’une logeuse d’un miteux bâtiment de Whitechapel à celui d’une institutrice travaillant pour une grande famille vivant à Knightsbridge. Les explications s’arrêtent là et je suis restée malheureusement sur ma faim.

Deux photos de Manchester, décor du "Nord" : la première montre St Ann's Square en 1876
la seconde représente le Market Place en 1885.

Bien évidemment, il ne me restait plus qu’à me rabattre sur la romance, ce sujet délicat où je deviens une lectrice particulièrement exigeante. Certains le savent déjà, j’aime quand les portraits des personnages sont mouchetés d’imperfections : des tendances capricieuses, des réactions humaines, des défauts naturels… Or, Margaret Hale semble être une véritable sainte dont l’orgueil inconscient serait, aux yeux de son entourage, le seul point négatif. Elizabeth Gaskell abuse des descriptions sur son physique parfait, du charme qu’opère son héroïne sur ses proches. Pourtant, le roman étant axé assez drame, je ne pense pas que tant de deuils, crises de larme et déceptions forment vraiment un cocktail miracle de beauté. Les moments de faiblesse qu’a Margaret n’en sont pas, sa force de vivre paraît à certains moments improbable et ses réactions insoupçonnées font d’elle une jeune fille beaucoup trop prodigieuse pour être raisonnable. Ses intentions sont certes bonnes et admirables, mais trop de perfection détruit un personnage qui a tant de potentiel.
Alors que d’un autre côté, John Thornton est, quoiqu’un peu trop classique, un personnage particulièrement attachant avec son physique quelque peu ingrat, ses répliques piquantes et ses moments rudes qui contrastent avec ses accès de vulnérabilité. J’ai énormément aimé sa relation avec sa mère qui est forgée dans la confiance et un amour un peu pudique. Par chance, d’autres personnages m’ont conquises, comme les Higgins avec la jeune Bessy (le choc par contre, je l’imaginais avoir 8 ans avant de lire qu’elle en avait 19... Comme elle grandit vite…), Dixon et sans oublier le généreux Mr Bell. Bien que dans le fond, je les ai tous trouvé assez creux, peu travaillés et tombant parfois dans le cliché (j’aimais beaucoup Nicholas Higgins mais à la longue, il me fatiguait presque).

Le Paradis de Margaret de nos jours : à gauche, New Forest, à droite, une maison dans le Hampshire.

Quant à la romance en elle-même, là encore je trouvais qu’elle manquait de réalisme : elle n’est pas progressive, débarquant en quelques phrases seulement, sans compter que j’ai trouvé qu’il ne se passait pas grand chose. J’avais même du mal à comprendre certaines réactions et voir les personnages tourner en rond pendant des centaines et des centaines de pages, c’est assez lassant. Je n’ai pas trouvé cette romance belle, je l’ai trouvé particulièrement frustrante et lente. Je trouvais aussi qu’Elizabeth Gaskell avait trop souvent recourt à des éléments faciles : telle personne se trouve à tel lieu et à tel moment, sans explication, soudainement et permet alors d’enchaîner sans surprise. Au final, le récit est beaucoup trop linéaire sans de vrais retournements de situation. [spoiler] Je pense notamment à ce bout d’enquête où la police suspecte Margaret d’avoir quelque chose à voir avec la mort de Leonards et, simplement grâce à des charmes, Margaret arrive à repousser les doutes du policier Watson. [/spoiler] Forcément, la facilité est plus qu’évidente ici…

Nord et Sud partait vraiment d’un bon pied, les 200 premières pages étaient efficaces, entraînantes, mais peu après, l’histoire tourne sur un même point, avance sans creuser davantage sur des aspects que j’aurai aimé comprendre et se termine beaucoup trop rapidement. J’ai même eu l’impression que les derniers chapitres étaient comme bâclés et ne m’ont pas convaincu.
Nord et Sud est donc une histoire qui m’a déçue, peu émue malgré son contexte et son potentiel. En revanche, pour les lecteurs et lectrices avides de romance innocente et de pavés amoureux, l’aventure devrait être plus efficace qu’avec moi.

Un exemple de mantille en dentelle noire, cadeau que reçoit Margaret d'une certaine femme.
Doña Isabel de Porcel, par Francisco de Goya (vers 1805)
« Mon précepte  moi, c’est : « Fais quelque chose, [Margaret], fais du bien si tu le peux, mais fais quelque chose. »
- Même si c’est du mal ? Demanda Margaret, avec un léger sourire malgré ses larmes. »
P. 391
             Quelques anecdotes sur ce bouquin,
• Milton est une ville inventée par Elizabeth Gaskell qui a été inspirée par Manchester où elle a passé une bonne partie de sa vie, plus exactement à Plymouth Grove. Darkshire est aussi une contrée inventée (même si les fans les plus hardis de World of Warcraft me diront le contraire). Il en est de même pour Helstone (un village se nomme effectivement Helstone mais tout au Sud des Cornouailles) bien que cette fois, le Hampshire existe pour de bon.
• Il me reste tout de même encore à voir l’adaptation BBC par Sandy Welch qui réunit Daniela Denby-Ashe et Richard Armitage à l’écran. Je permets juste un petit commentaire sur l’actrice : j’aime l’apparence que dégage Daniela Denby-Ashe (peut-être arrivera-t-elle à me faire aimer Margaret ?) car pour une fois, il ne s’agit pas d’un sac d’os dans une adaptation où les femmes belles sont censées rimer avec femmes assumant de vraies formes. Personnellement, j’ai toujours désapprouvé l’idée des rôles d’Anne Hathaway pour Jane Austen ou encore de Keira Knightley pour Elizabeth Bennet... Ces deux actrices sont maigres comme des autruches déplumées et sont clairement des canons du XXIème siècle. Ça leur ferait si mal de prendre quelques kilos le temps de porter un corset ?

samedi 16 mars 2013

Salem, de Stephen King,

Comment une petite bourgade du Maine peut-elle, du jour au lendemain, devenir une ville fantôme ? Jerusalem's Lot, Salem, n'avait pourtant pas de caractéristiques particulières sinon, sur la colline, la présence de cette grande demeure, Marsten House, inhabitée depuis la mort tragique de ses propriétaires, vingt ans auparavant. Et lorsque Ben Mears y revient, c'est seulement pour y retrouver ses souvenirs d'enfance. Mais très vite, il devrait se rendre à l'évidence : il se passe des choses très étrange à Salem. Un chien est immolé, un enfant disparaît et l'horreur s'infiltre, s'étend, se répand, aussi inéluctable que la nuit qui descend sur Salem ...
Quatrième de couverture par Le Livre de Poche.
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Conseillé par une professeure d’arts au collège avec un résumé bref mais avec des mots très bien choisis, je n’ai pas hésité longtemps avant de piquer Salem dans la bibliothèque maternelle et me lancer dans mon premier roman vampirique (je ne compte pas vraiment C'est dur d'être un vampire par Pascale Wrzecz comme de la littérature vampirique en fait…).

Ma lecture remonte donc à plusieurs années déjà et pourtant, je me sens capable de faire une chronique globale tant ce livre m’aura marqué. Il s’agit en fait de mon premier véritable King (outre les nouvelles qu’on me lisait au lit) et j’en suis ressortie totalement conquise et par l’auteur et par la créature du vampire. Pour les lecteurs curieux qui voudraient enfin se lancer dans l’expérience du populaire auteur horrifique, Salem serait le livre que je conseillerais puisqu’il réunit tous les éléments qu’on peut attendre d’un bon livre d’épouvante. Alors certes, Salem ne réinvente pas le mythe du vampire mais garde bien sa place parmi les grands : monstres pervers, mythe classique et passages effrayants, encore aujourd’hui, certaines scènes me reviennent, [léger spoiler] comme cette interminable scène où le fossoyeur se demande si l’enfant enterré a les yeux fermés ou bien ouverts, il hésite à recouvrir de terre le cercueil, mourant d’envie de vérifier ses craintes. [/léger spoiler] Et d’autres encore…
Bref, je suis incapable de remettre en question le talent de Stephen King pour les récits effrayants depuis cette lecture fascinante.

Une illustration signée John Picacio,
pour Knowing Darkness: Artists
inspired by Stephen King.
Cela dit, faire peur, c’est bien, mais des monstres travaillés ne suffisent pas. Autrement, beaucoup de slashers d’aujourd’hui connaitraient de francs succès et pourtant, ils leur manquent quelque chose : des créatures élaborées doivent faire face à des personnages élaborés. Personnellement, même si je ne suis pas totalement tombée sous le charme de  Ben Mears comme Susan, je me suis beaucoup attachée au petit Mark et ses scènes ne manquent pas d’intérêt. Sans oublier une petite pensée pour le Père Callahan et le redoutable Barlow. Forcément, une fois liée aux personnages, une fois captivée par leurs mésaventures et plongée dans l’histoire, la recette s'est montrée très efficace. Concernant le style en lui-même, je pense l’avoir déjà mentionné dans d’autres chroniques concernant Stephen King, mais j’aime sa façon d’écrire presque désinvolte, sa plume crue et directe. Sans vouloir se montrer poétique, sans vouloir atteindre des proses lyriques, Stephen King prime surtout sur la réalité, des pensées courantes, des détails anodins mais précis… Son style est vivable, réel et renforce donc la crainte de ce que l’on pensait n’être que des légendes.

Cette chronique scelle donc l’empreinte impérissable que m’a laissé Salem, grande œuvre de l’épouvante concernant les vampires, ces créatures qui deviennent plus immortelles que jamais après une bonne lecture de ce genre. Vous l’aurez compris, je conseille vivement ce livre aux véritables amateurs de vampires.
En revanche, de déconseille fortement l’adaptation de 1979 ! Ici, l’écrivain torturé Ben Mears devient un Claude-François américain et superficiel et le touchant Mark devient une tête-à-claques, en plus d’un problème de rythme terrible et d’un rendu peu convaincant. Les seuls éléments à garder sont la scène où Danny rend visite à Mark et l’acteur James Mason.
Je me réconforte en me disant que le DVD était d’occasion.

Je garde quand même l'illustration puisque le vieux vampire est efficace en photo.
Mais pas à l'écran...

             Quelques anecdotes sur ce bouquin,
• Si certains l’ignorent, au moins ils l’auront peut-être deviné : Stephen King a été inspiré par Dracula de Bram Stoker. L’idée est partie d’une simple question : que se passerait-il si Dracula vivait un siècle plus tard, à la fin du XXème siècle ?
• Les grands fans de Stephen King savent déjà que l’auteur aime réutiliser certains de ses personnages, bien souvent en clin d’œil. C’est le cas avec Père Callahan qu’on peut retrouver dans la saga La Tour Sombre.
• Dans deux interviews différentes, Stephen King cite Salem comme étant son livre préféré parmi ses propres romans.
• Il existe énormément de villes aux États-Unis qui se nomment Salem, mais par chance pour Stephen King, aucune de celles du Maine ne porte ce nom.

samedi 2 mars 2013

Le Pas de Merlin, de Jean-Louis Fetjaine,

Au VIe siècle, l'île de Bretagne est assaillie par les Saxons, les Gaëls et les Pictes. Après la mort du roi Guendoleu, tué lors d'une terrible bataille, son jeune barde Merlin se trouve plongé malgré lui dans un complot aux conséquences effroyables.
Fuyant la barbarie, perdu dans les affres d'un amour impossible, il parcourt les royaumes celtes ravagés par la guerre, suscitant la méfiance de ceux qui voient en lui le "fils du diable". Au plus profond de la forêt, pourtant, l'enfant se découvrira de bien étranges alliés. Au cours de ce voyage initiatique, celui qui deviendra Myrddin le Nécromant réussira-t-il à percer le fascinant secret qui pèse sur ses origines ?
Quatrième de couverture par Pocket (Fantasy)
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« Quelle sorte d’homme es-tu ? Et quelle sorte de Dieu sers-tu ? Tu n’es bon qu’à prier les morts ! »
P. 156
À mon tour, je découvre Jean-Louis Fetjaine, un auteur de la Fantasy française qui m’intéressait depuis un temps. Plus connu pour ses récits elfiques (la Trilogie des Elfes et les Chroniques des Elfes), j’ai plutôt essayé des romans plus discrets et je me suis donc lancée dans la petite saga du Pas de Merlin. Rien d’insurmontable, cela dit, Le Pas de Merlin ne se compose que deux tomes qui ne sont pas des lourds pavés.
Une première lecture qui partait assez mal et qui finalement, m'a réservé de bonnes surprises, juste de quoi me donner envie de poursuivre l'aventure.

Déjà, pour les intéressés, je préfère mettre en garde tout de suite : Le Pas de Merlin (nom du premier tome) est un mixte entre fiction et documentaire, c'est donc une première entrée dans de la fantasy légère et on sent que Jean-Louis Fetjaine garde de très bons souvenirs de ses études d’Histoire Médiévale. Le dossier en introduction est d’ailleurs bien complet et m’a aidé à me repérer entre tous ces peuples celtes. Toutefois, je me suis permise de compléter la carte qui figure juste avant le premier chapitre et de la rendre plus lisible, parce que les lettres pixelisées, hein... (j’espère qu’elle sera utile pour les futurs lecteurs, si j’ai oublié quelque chose ou si je me suis trompée, n’hésitez pas à me prévenir) :
 
En revanche, rien à redire pour la liste des personnages, elle a été très utile et je suis souvent revenue dessus.
Donc je pense que vous l’aurez compris : dans ce premier tome, le contexte Historique prend le pas sur le Fantasy et est très riche, très complet. Si j’aime tant les peuples celtes, ce n’est pas uniquement pour leurs légendes et leur imaginaire, mais aussi pour leurs coutumes, leur Histoire et leurs racines. En apprendre plus sur le peuple des Pictes, par exemple, m'a fait plaisir. Mais bien sûr, comme tout peuple humain, les armées menaient des guerres, et c'est le thème principal du Pas de Merlin en fait : bataille, trahison, tradition et survie, on est face à la guerre façon bien nordique et l’ambiance est plutôt bien installée. Je déplore juste un style un peu trop simpliste que j’ai trouvé même confus à certains moments.
[ci-contre, Saint Colomba aux portes de la forteresse du Roi Brude, illustration datant de 1906, par John R Skelton]

Cela dit, il ne faut pas prendre le Pas de Merlin comme une référence historique pour autant, ni un documentaire : il s’agit après tout du personnage de Merlin et je pense que le seconde tome, Brocéliande, sera beaucoup plus porté sur l’univers fantastique. C’était un petit peu une déception d’ailleurs : on voit très peu de fantastique dans les premiers chapitres et ce n’est que lors des dernières pages qu’on se sent pleinement dans une épopée mystique. En fait, le récit va en crescendo et s’arrête à un moment crucial.

[ci-contre, la ville de Cenarth au Pays-de-Galles de nos jours]

La fin laisse entendre un changement crucial pour les personnages, notamment le héros central et j'espère vraiment un changement dans le second tome, car je n’ai pas tellement apprécié le personnage de Merlin en fait. Je l’ai trouvé presque exagéré, mature pour un enfant certes mais par moments tête-à-claques et rien ne le rendait sympathique à mes yeux. Pour être honnête, j’ai même préféré l’un de ses ennemis [spoiler] le roi Ryderc [/spoiler], que je ne vois pas tellement comme un méchant en fait, je le voyais plus comme un personnage manipulé, comme le Roi Thomas dans Les Yeux du Dragon de Stephen King : quelqu’un de jeune qui s’appuie sur les mauvaises personnes. J’espère que j’y vois juste et que ce concept évoluera dans le second tome, ce qui pourrait être intéressant, quoique après, je peux aussi lourdement me tromper et ce personnage n’est en réalité que le pire des salauds. Je verrai bien.

 
Le peuple écossais, les Pictes, sont surtout représentés avec des peintures de guerre bleues. Image tirée du film péplum Centurion (2010).

En tout cas, bien que j’avais peur de ne pas accrocher au livre après les premiers chapitres, notamment parce que j’avais du mal à me repérer et me plonger dans l’univers, mon intérêt grandissait au fil des pages et je terminerai la saga en lisant Brocéliande dès que je l’aurai acheté, en espérant que la conclusion de l’aventure de Merlin Le Nécroman me satisfera pleinement. D'ailleurs, la lecture a été un vrai plaisir avec une artiste que j'aime énormement, Loreena McKennitt. Rien de tels que ses morceaux pour être dans l'univers que décrit Fetjaine :
Je parlais de cet auteur avec Léo Elfique d’ailleurs qui m’avait vivement conseillé les lectures des fameuses sagas elfiques, ayant Les Chroniques des Elfes déjà dans ma PAL, je pense que je ne tarderai pas trop à me lancer dedans~
Couverture, The Lady of Shalott, par John William Waterhouse (1894)
Si en plus on me prend par les sentiments avec mon peintre favori…

J'en profite pour rattacher cette chronique au Challenge des Légendes Arthuriennes :

             Quelques anecdotes sur ce bouquin,
• Jean-Louis Fetjaine s’appuie sur des récits historiques et une bonne majorité des personnages ont réellement existé, comme Ryderc, Saint Colomba, Brude mac Maelchon, Áedán Mac Gabrán (ou Áedán de Daliada)... Saint Colomba a, comme dans le chapitre I Le Présage, assuré à Ryderc Hael que Dieu avait prévu qu'il mourrait dans son sommeil, chez lui.
• Bien qu'il ne soit pas question d'Arthur dans Le Pas de Merlin, j'ai quand même ajouté le tag Invité: Roi Arthur puisque la présence importante de Merlin suffit pour considérer ce roman comme un récit arthurien, en plus, il y a le futur Père Blaise.
• J’avais juste envie de dire que mon cher Works veut corriger « elfiques » par « celtiques ». Presque Works, presque.
• Pour ceux qui sont intéressés, la chronique du second et dernier tome.