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samedi 29 avril 2017

Conan le Cimmérien, Le Phénix sur l'Épée et autres nouvelles, de Robert E. Howard,

Robert E. Howard n’imaginait pas un instant que le numéro de décembre 1932 de la revue Weird Tales allait faire entrer son nom dans l’histoire comme créateur de Conan le Cimmérien, barbare de l’Âge Hyborien et inventeur de l’Heroic Fantasy.

Les aventures de Conan sont une épopée haute en couleur, regorgeant d’exploits en tout genre, de personnages plus grands que nature, de décors fabuleux. Mais elles furent réarrangées après la mort d’Howard selon une chronologie arbitraire, réécrites ou modifiées par d’autres auteurs.
Il était temps de rendre son œuvre à son créateur en publiant l’intégrale des nouvelles de Conan dans leurs versions authentiques écrites par Robert E. Howard.

Ce premier volume présente les nouvelles suivantes :
- Le Phénix sur l’Épée
- La Fille du Géant du Gel
- Le Dieu dans le Sarcophage
- La Tour de l’Éléphant
- La Citadelle Écarlate
- La Reine de la Côte Noire
- Le Colosse Noir
Quatrième de couverture par SonoBook.
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Icône de la culture Fantasy, Conan le Barbare est surtout connu depuis qu’il a été immortalisé par les traits d’Arnold Schwarzenegger. On a retenu le film et les illustrations quelque peu machos, malgré tout, c’est un univers littéraire avant tout et il me plaît. J’étais heureuse de trouver l’audiobook des premières nouvelles écrites pas Robert E. Howard !
Et bien que la carrière d’Howard fût courte, bien que j’ai terminé ce premier volume, un second m’attend pour mon plus grand bonheur.

Une carte qui sera utile.

Le Phénix sur l’Épée (The Phoenix on the Sword),
Avec Le Phénix sur L’Épée, on entre dans le vif du sujet ! Un complot vise à renverser Conan, roi fraîchement couronné après avoir chassé du trône le tyran précédant et libérant tout un peuple. Mais enfin, ce n’est pas parce qu’on vit dans son palais qu’on a oublié d’être un barbare : Conan est reconnaissable avec son désir de se battre, sa franchise presque naïve et sa simplicité brutale. Conan, quand il n’aime pas, il frappe. Et j’aime cette philosophie de vie.
Mais que les lecteurs plus portés sur la réflexion ne fuient pas ! Cette première nouvelle n’est pas un enchaînement de bastons : le complot est ficelé. Mais ce qui l’est encore plus, c’est l’ambiance. Il se dégage quelque chose de cette nouvelle où on imagine l’Antiquité, l’Orient, quelque chose d’exotique (dans le sens lointain mais aussi original) : un cocktail très différent où on ne stagne pas sur l’éternelle Fantasy médiévale. Même si le travail de Robert Howard est plutôt "léger" car l’auteur a laissé peu de productions derrière lui, cela n’empêche pas son univers d’être travaillé, peaufiné.
On s’attache donc vite à cette brute qui règle les problèmes avec une arme ou ses poings mais qui possède une force de caractère qui laisse admiratif.

La Fille du Géant du Gel (The Frost-Giant’s Daughter),
Une nouvelle assez courte mais pleine de charme : comme une matinée d’Hiver en Finlande où la glace est mordante, piquante. Décidément, l’ambiance est le point fort de Robert Howard car ici, on ne baigne pas dans une lumière d’été ou de soleil ardent : on erre dans un désert de glace, rendant le décor à la fois beau et dangereux avec la touche principale : la fascinante Attali.
Comme pour la nouvelle précédente (et les suivantes), Howard développe les religions de son univers et on sent la nette influence des croyances nordiques.

Le Dieu dans le Sarcophage (The God in the Bowl),
Bon, une enquête, vous vous y attendiez ? Bah moi non plus. Et pourtant, Conan est bien pris pour le meurtrier de Kallian Publico et il va falloir qu’il se sorte de ce mauvais pas. Certes, Howard ne traite pas son sujet comme le ferait Agatha Christie ou Arthur Conan Doyle, elle a malgré tout son importance pour cette histoire : quelques points de réflexion guideront le lecteur pour démêler cette énigme, en plus d’une plongée dans les cultes religieux de cet univers.

La Tour de l’Éléphant (The Tower of the Elephant),
Une excellente histoire qui est assez émouvante. Ce qui est surprenant, c’est qu’on pourrait penser que les nouvelles de Conan pourraient être redondantes : violentes, sexy, bourrées de mythes… les ingrédients constants. Et bien pas du tout ! Certes ces mêmes éléments se retrouvent, en même temps que l’originalité (pour l’époque notamment qu’il fait partie des pionniers de la Fantasy) et pour peu qu’on s’y prête au jeu, l’émotion aussi, surtout dans celle-ci.
« En règle générale, les hommes civilisés sont plus malpolis que les sauvages car ils savent qu’ils peuvent se montrer grossiers sans se faire fendre le crâne pour autant. »

La Citadelle Écarlate (The Scarlet Citadel),
Il me faut bien une petite perte d’intérêt : La Citadelle Écarlate, à côté des précédentes, n’arrivait pas à me captiver vraiment. L’intérêt est présent, l’histoire est sympathique, mais c’est vraiment sans plus à cause d’un aspect plus brouillon, alors que Robert Howard avait conservé jusqu’à maintenant un certain souci du détail.
De plus, les complots de guerre ne sont pas vraiment ma tasse de thé et j’ai préféré les autres aventures. (et ce n’est pas pareil pour Le Trône de Fer : la géographie est mieux aboutie et les personnages sont bien plus nombreux)


La Reine de la Côte Noire (Queen of the Black Coast),
Décidément, on le comprend une bonne fois pour toutes : les serpents, c’est vraiment le mal dans l’univers de Conan ! Et Howard en rajoute une couche en nous entraînant en mer, seule décor que ses lecteurs n’avaient pas encore exploré.
Les lectrices trouveront leur bonheur dans ce monde de brutes avec une redoutable femme (qui sent bon le fantasme, mais bon) : Bêlit, reine des pirates, apporte une touche de romance qui adoucit ce récit.
Ce n'est pas un Jane Austen, mais cela reste beau et s'accorde bien à cette ambiance sauvage. Et non : on ne s’intéresse pas qu’aux seins de Bêlit, elle est plus qu’une beauté sulfureuse, rassurez-vous.

Le Colosse Noir (Black Colossus),
Une nouvelle qui verse aussi dans la romance, mais ici, quelque chose de plus pudique, de plus sensible avec la princesse Yasmela, moins "forte" que Bêlit (ou même Attali) mais qui apporte une touche féminine agréable. Avec cette présence, Conan prend plus des allures de chevalier blanc insoupçonné que du barbare. Ça change, mais enfin, ce n’est pas désagréable et ça ne sonne pas faux durant la lecture.
L’histoire, très rattachée à la religion inventée par Howard, est intéressante en plus.

Tout ça me laisse une impression très positive ! Conan le Cimmérien est une excellente surprise et je ne tarderai pas à me lancer dans le second volet qui me réserve sept autres nouvelles.


             Quelques anecdotes sur ce bouquin,
• Conan est un héros inscrit depuis un moment dans la pop culture. Ses histoires n’ont pas été écrites seulement par la main de Robert E. Howard mais par bien d’autres auteurs comme Lyon Sprague de Camp, Lin Carter ou Robert Jordan. Certains textes premiers d’Howard ont même été retravaillés après sa mort prématurée, l’auteur s’étant suicidé à à peine 30 ans.

lundi 20 mars 2017

Lais, de Marie de France,

Contes d’aventures et d’amour, les Lais, composés à la fin du XIIème siècle par une mystérieuse Marie, sont d’abord, comme le revendique leur auteur, des contes populaires situés dans une Bretagne ancienne et mythique. Les fées y viennent à la rencontre du mortel dont elles sont éprises ; un chevalier peut se révéler loup-garou ou revêtir l’apparence d’un oiseau pour volet jusqu’à la fenêtre de sa bien-aimée.
Mais la thématique universelle du folklore est ici intégrée à un univers poétique à nul autre pareil, qui intériorise le merveilleux des contes de fées pour en faire l’émanation de l’amour.
Quatrième de couverture par Le Livre de Poche.
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Si vous aimez la Bretagne et le Moyen-âge, vous devez impérativement lire ce recueil de vieilles légendes de ces contrées celtes : le style médiéval peut rebuter, mais les histoires sont courtes, simples et bien souvent pleines de charme.

Et puisque nous fêtons aujourd’hui le printemps :
The Progress of Spring (1905), par Charles Daniel Ward

             Guigemar (Guigemar),
Le recueil ouvre le bal musical avec un conte très classique qui ne surprendra pas les lecteurs des légendes médiévales : un chevalier trop téméraire chassera une biche enchantée et, en la blessant, la flèche se retournera contre lui, ne pouvant être retirée que par une femme amoureuse. Après la malédiction, il y a l’amour entre le chevalier et la male-mariée qui se déclareront leurs sentiments sans pouvoir les afficher : le chevalier aura une chemise nouée que seule son aimée pourra défaire, tandis qu’elle portera une ceinture que seul son amour pourra défaire.
Bref, le quotidien de nos ancêtres du XIIème siècle, ils ne s’embêtaient pas avec les statuts Facebook, hé.
Rien de très claquant mais Guigemar met dans le bain.

             Equitan (Equitan),
J’ai déjà plus apprécié Equitan : le côté un peu moral n’est pas à prendre au sérieux avec une fin franchement burlesque. Si l’infidélité ne pose pas de problème dans Guigemar, dans Equitan, la méchanceté ajoutée fait qu’il y a une punition qui plane au-dessus des coupables.
Un humour certain dans ce lai qui se rapproche des contes burlesques de l’époque.
(Et il met dans le bain aussi. Vous voyez mon humour ?)

             Le Frêne (Le Fraisne),
Une histoire originale car Marie de France aborde le thème des jumeaux (une particularité de naissance qui posait problème au Moyen-âge) qui est peu utilisé dans les légendes médiévales.
Le récit est plutôt touchant avec l’aventure de cette jeune Frêne (oui, je parle de la demoiselle, là) et ce milieu religieux.

             Bisclavret (Bisclavret),
Loup-garou oblige, j’ai été emportée par Bisclavret ! D’autant plus surprenant que le loup-garou n’est pas le méchant de l’histoire, au contraire : c’est le personnage principal qui sera trahi par sa femme. À la base, en tant que créature maudite et effrayante, le loup-garou a le mauvais rôle, ici, il est au contraire soutenu.
Chose que je n’aurais jamais imaginé pour un récit médiéval !
Un lai que j’adore.


             Lanval (Lanval),
Héhé, le lai qui s’inscrit dans les légendes arthuriennes. Lanval est un récit que je suis même surprise de n’avoir jamais vu dans Kaamelott : un chevalier que tout le monde oublie sans cesse, y a de quoi faire de bons sketchs !
Autrement, Lanval n’a rien à envier à ses collègues Lancelot ou Yvain : son récit est intéressant et le côté féerique est bien plus appuyé que dans les autres légendes qui versent vraiment dans la merveille surprenante.

             Les Deux Amants (Les Dous Amanz),
Lai assez curieux, Les Deux Amants a un côté burlesque et ne possède aucun sérieux : la fin est même presque ridicule ! Comme une blague avec une chute (sans jeux de mots).
Vraiment pas le lai le plus marquant mais il fait sourire.

             Yonec (Yonec),
Un lai avec un air de légende : poème assez long, toute l’histoire est détaillée et bien construite. Yonec s’inscrit parfaitement dans les récits du Moyen-âge.
Métamorphoses, male-mariée, amour caché… il y a tout, même la demoiselle qui s’évanouit une paire de fois en quelques heures !
Un bon récit.

             Le Rossignol (Aüstic),
Malgré mon amour pour Bisclavret, Le Rossignol est certainement mon lai préféré : il est plein de poésie, tout en pudeur. Il s’écarte des merveilles et du surnaturel et serait presque un conte réel, rajoutant à l’émotion que Le Rossignol me laisse.
Si vous n’avez pas le courage de lire le recueil entier, lisez au moins Le Rossignol.


             Milon (Milun),
On retourne ici à un lai classique qui s’inscrit comme une énième légende médiévale. L’histoire est sympathique mais rien de très marquant, surtout après Bisclavret et Le Rossignol qui sortent clairement de l’ordinaire : passer après mes deux coups de cœur, c’est difficile.

             Le Malheureux (Chaitivel),
Tout d’abord commune, cette histoire offre en fait une conclusion en double teinte très intéressante : Le Malheureux peut aussi s’appeler Les Quatre Deuils et ces deux titres offrent un approfondissement intéressant.
Un lai très sympa.

             Le Chèvrefeuille (Chievrefueil),
J’ai eu un souci avec ce lai car il est très connecté au récit de Tristan et Yseult, récit que je n’ai pas encore lu. J’étais donc perdue, je ne comprenais pas grand-chose (ce serait comme lire le tome trois du Trône de Fer avant de lire le premier).
Donc je ne peux pas vraiment me prononcer : je relirai Le Chèvrefeuille une fois que j’aurai lu Tristan et Yseult.

             Eliduc (Eliduc),
Comme pour le premier lai qui met dans le bain, le dernier s’inscrit dans la lignée et clôture ce recueil avec cette aventure classique, histoire d’achever les impressions "légendes médiévales". Malheureusement, Eliduc n’a rien de très original et ne sort pas du lot.

Je termine donc ma lecture avec un avis mitigé : j’adore les légendes médiévales, j’ai eu de vrais coups de cœur pour certaines, autrement, d’autres sont nettement plus communes et s’effaceront assez vites de ma mémoire. Mais je ne regrette absolument pas ma lecture !

Grâce à deux lais, je peux rattacher ce livre au Challenge des Légendes Arthuriennes !

             Quelques anecdotes sur ce bouquin,
• Concrètement, Mairie de France "n’a rien inventé" : elle a surtout immortalisé des légendes connues en Bretagne. C’est ce qu’elle précise dans l’introduction.

mercredi 15 février 2017

Christmas Pudding, d'Agatha Christie,

Six nouvelles, six facettes de l’ingéniosité et du talent d’Agatha Christie, et, bien sûr six énigmes habilement résolues par Hercule Poirot et Miss Marple.
Quatrième de couverture par Le Livre de Poche.
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Je suis quelqu’un d’assez simple, quand je vois des boobs, je like, quand j’ai un roman sur un thème précis du calendrier, je le lis durant la période adéquate : forcément, j’ai emporté Christmas Pudding pour les fêtes de fin d’année. Le rêve aurait été de fêter Noël au pied de Big Ben et lire ces nouvelles à thème avec un tasse d’Earl Grey et une tranche de pudding.
Et finalement, ce n’est pas grave d’être restée en France durant les fêtes, puisqu’hormis la première, les autres nouvelles n’ont rien à voir du tout avec Noël. Le titre, Christmas Pudding, est celui de la première enquête et l’illustration ne concerne que celle-ci. Cette "publicité mensongère" a fait énormément baisser mon ressenti.

La première nouvelle, pour rester sur celle-ci, est parfaite : l’ambiance festive et propre à un Noël anglais, ça rappelle les cours de sixième en Décembre où on apprend tout le vocabulaire et les coutumes, entre les christmas crackers, les (ugly) christmas jumpers, le plum pudding, les mince pies, la roast turkey et crier « Merry Christmas ! » en sortant de classe. Bref, j’en rêvais à l’école, là, Agatha Christie retranscrit ces traditions et nous plonge dedans sans difficulté. Ce qui aide, c’est qu’Hercule Poirot étant belge, elle prend en compte la vision d’un étranger et confronte les points de vue.

Mais enfin voilà, les autres nouvelles ne possèdent pas du tout cette ambiance, pas l’ombre d’un sapin dans le décor ! Il y a certes des fêtes, comme pour Le Mystère du Bahut espagnol, mais sinon, c’est tout. À ce stade, j’ai continué plus pour voir si les autres enquêtes pouvaient s’inscrire dans la ligné de Christmas Pudding mais aucune n’a répondu à mes attentes. Pire, Le Policeman vous dit l’heure présente de beaux moments sous le soleil, rappelant des décors de Provence. Donc pour une première rencontre avec Miss Marple, j’étais peu enthousiaste et, arrivée au bout de ma lecture, je ne suis pas charmée.

Grosso modo, la Reine du Crime reste fidèle à elle-même en concoctant des enquêtes intelligentes, des preuves intrigantes, une pointe d’originalité, notamment pour Le Rêve, un contexte original pour un mystère à la hauteur de Hercule Poirot. Mais voilà, quand on présente un papier cadeau aussi alléchant, alors que le contenu n’a rien à voir, ça fait l’effet douche froide.
Lisez la première enquête le soir de Noël, ensuite, vous pouvez mettre le livre en pause pendant quelques mois, ce ne sera pas grave, ce ne sera pas décalé.

             Quelques anecdotes sur ce bouquin,
• Il y a une préface très mignonne où Agatha Christie nous raconte les Noëls de son enfance, une petite entrée en matière très agréable.

mercredi 20 juillet 2016

Histoire d'une Parisienne, d'Octave Feuillet,

C’est l’histoire d’un "ange", bien élevé par sa mère mais mal marié par sa mère.
Cette histoire commence et se termine ainsi :
« Il serait excessif de prétendre que toutes les jeunes filles à marier sont des anges ; mais il y a des anges parmi les jeunes filles à marier. [...] La conclusion de cette histoire trop véritable est que, dans l’ordre moral, il ne naît point de monstres : Dieu n’en fait pas ; – mais les hommes en font beaucoup. – C’est ce que les mères ne doivent pas oublier. »
Quatrième de couverture par Pomme de Littérature Audio.
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« Mais [Monsieur de Maurescamp] oubliait trop qu’une jeune Parisienne polie par la civilisation et affinée par la plus délicate éducation ne cesse pas assurément d’être une femme, mais qu’elle cesse absolument d’être un animal. Si elle retourne à l’état sauvage, ce qui n’est pas sans exemple, c’est son mari qui l’y ramène. »
Ce qui est beau avec Littérature Audio, c’est qu’on peut tomber sur des nouvelles appartenant désormais au domaine public et qui sont assez méconnues car peu publiées.
C’est donc grâce à la contribution de la lectrice Pomme que j’ai découvert l’une de celles d’Octave Feuillet (que j’ai tout d’abord confondu avec son contemporain Octave Mirbeau, assez connu aujourd’hui avec Journal d’une femme de chambre… Octave que j’ai parfois envie d’appeler Octave Mouret avant de me souvenir que ce dernier est fictif), une nouvelle agréable qui mérite ces quelques heures d’attention.

Si je ne juge pas cette nouvelle inoubliable, elle reste toutefois sympathique : une sorte de conte avec morale, une histoire d’une modernité assez surprenante qui propose une vision très différente de la femme au XIXème siècle, tranchant avec les autres figures bien connues.
Moins connue que Nana ou Emma Bovary, Jeanne Bérengère de Latour-Mesnil, qui devient madame de Maurescamp, mérite bien sa place chez les femmes avec un fort caractère. D’autant plus que je n’attendais pas à une telle tournure dans son évolution travaillée…

L’auteur en personne.

Quand j’ai commencé à écouter Histoire d’une Parisienne, je ne connaissais ni le résumé, ni l’auteur, et puisque que l’histoire était courte, je me disais que ça irait très bien pendant que je faisais la vaisselle : le début laisse imaginer une petite histoire pudique et dramatique, le genre qui fait plaisir de temps en temps.
Cela dit, l’abus d’histoires d’amour niaises peut être dangereux pour la santé.
Et bien finalement, Octave Feuillet vient vite piquer l’attention du lecteur avec du cynisme et un humour décalé. L’histoire ne fera pas rire de joie mais arrachera certainement quelques ricanements de surprise. L’histoire n’est pas spécialement originale mais elle reste agréable et surprend : ce n’est pas de la romance toute en rose, c’est quelque chose d’un peu plus sombre qui plaira aux désabusés.

Je parle d’humour, mais je dois reconnaître la première qu’Histoire d’une Parisienne a été émouvant à plusieurs reprises : deux passages notamment et qui met en avant le personnage de Jeanne de Maurescamp, une femme qu’on pourrait presque plaindre et admirer.

Histoire d’une Parisienne fera plaisir à ceux qui cherchent des fortes têtes du XIXème siècle et la très bonne lecture de Pomme fait vivre ce récit piquant, cynique. Une sorte de conte moderne qui fera sourire malgré le fond assez triste avec son personnage central.

             Quelques anecdotes sur ce bouquin,
• Membre de l’Académie Française et occupant la place 13 (place actuelle de Simone Veil ♥) entre 1862 et 1890, Octave Feuillet a sa propre page sur le site de l’Académie Française.

mardi 16 février 2016

Allô, Hercule Poirot, d'Agatha Christie,

Six nouvelles, six chefs-d’œuvre : disparition mystérieuse d’un banquier, vol de bijoux, suicide maquillé en crime… Point n’est besoin d’analyses sophistiquées ou d’expertises balistiques, Hercule Poirot est là…
Quatrième de couverture par Le Livre de Poche.
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Les recueils de nouvelles d’Agatha Christie connaissent bien moins de succès que ses romans comme Dix Petits Nègres ou Mort sur le Nil. Moi-même je garde très peu de souvenirs du recueil que j’ai lu... Toutefois, Allô Hercule Poirot me laissera une meilleure impression que Les Enquêtes d’Hercule Poirot !


• La Disparition de Mr. Davenheim (Disappearance of Mr. Davenheim), 3/5
Une petite nouvelle très classique dans le domaine d’Hercule Poirot : une énigme à résoudre tout en restant au fond du canapé… Mais c’est Japp qui ramène les informations ! Ce qui ajoute le piment dans cette nouvelle, c’est bien le caractère du détective belge : aussi imbuvable que les tasses de chocolat sirupeux qu’il boit, son orgueil est à son comble mais mes ricanements accompagnaient chaque réplique bien sentie.
Le problème est que certains indices et certains dénouements n’arrivent pas vraiment grâce aux talents de détective et j’avoue que j’avais compris d’avance la conclusion...

• Un Indice de trop (The Double Clue), 3/5
Une nouvelle que j’avais hâte de lire pour une raison majeure : voir la fameuse comtesse russe Vera Rosakoff.
Ce nom ne vous dit rien ? C’est pourtant la femme qui fait tourner, plus ou moins, la tête du détective belge. Un p’tit soupçon d’amour dans cette enquête un peu creuse mais avec des indices originaux. Vera est définitivement la star au milieu de ce complot et je regrette même qu’elle n’apparaisse qu’en de rares occasions par la suite... Elle a autant de talent pour animer un récit que Poirot lui-même.

Je ne suis pas une grande fan des versions animales du style, mais Basil étant un Sherlock Holmes en souris,
Hercule Poirot peut bien avoir sa version avec Vera et celle-ci, réussie, est signée par CeskaSoda.
• Le Guêpier (Wasps’ Nest), 4/5
Ma nouvelle préférée.
Hercule Poirot vante souvent la branche psychologique et ne cache pas son admiration. Pourtant, même si les romans d’Agatha Christie sont dotés d’une sensibilité plus humaine que les travaux d’Arthur Conan Doyle, la psychologie n’est pas toujours mise en avant. J’ai déjà remarqué que la Reine du Crime était fine psychologue et proposait des personnages riches, mais la brièveté de ses romans fait que le format ne lui permet pas de s’étendre de trop.
Ironiquement, pas cette fois avec Le Guêpier ! L’enquête est intéressante mais c’est surtout la relation de Poirot avec la victime et l’assassin qui apporte le meilleur point dans cette affaire.
J’espère même retomber sur le même genre de schéma dans un autre roman.

• La Poupée de la Couturière (Dressmaker’s Doll), 4/5
Ici, on quitte définitivement la compagnie de Poirot. N’étant pas au courant, j’ai été déstabilisée car dès les premières pages, on devine une ambiance surnaturelle et je me demandais comment j’avais fait pour ne jamais entendre parler d’une confrontation posée par Christie entre des forces obscures et Hercule Poirot !
Malheureusement, je n’ai pas eu ce plaisir (Poirot "blague" plus d’une fois sur une croyance et il me semble qu’il est plutôt croyant, mais une confrontation avec le surnaturel n’a jamais été mise en évidence), en revanche, j’ai eu la surprise de découvrir la Reine du Crime autrement : non plus en tant que Reine du Crime mais en tant qu’écrivain. Une très bonne écrivain, même, car je suis vite retournée en selle pour apprécier pleinement cette nouvelle aux tendances terrifiantes et à la conclusion qui laisse songeur...

• Le Signal rouge (The Red Signal), 3/5
Une nouvelle un peu alambiquée et lente à démarrer, la conclusion est satisfaisante mais j’ai eu du mal à m’intéresser à cette histoire-ci.
Les personnages sont nombreux et on soupçonne rapidement une sorte de mascarade qui va éclater d’un moment à l’autre : la chute arrive avec un certain panache quoiqu’elle est assez clichée. Clairement en-dessous de La Poupée de la Couturière.

• S.O.S. (SOS), 3/5
Comme pour Le Signal rouge, S.O.S. est une nouvelle qui s’étire en longueur. On revient vers une dimension surnaturelle qui s’assume pas tout à fait mais l’angoisse de ce doute est beaucoup moins frappant que dans La Poupée de la Couturière.
J’avais une nette sensation de redondance dans cette nouvelle et l’impression qu’Agatha Christie usait de beaucoup trop de détours pour cette conclusion qui se résume à "si peu". La fin n’est pas mauvaise, elle est même correcte, mais la Reine du Crime proposait précédemment deux chutes plus marquantes.
Une fin un peu mitigée donc.


Un recueil de nouvelles où je m’attendais à un certain ennui et une déception de ne plus voir Poirot, mais Agatha Christie, grâce à cette absence, s’autorise à aborder une dimension surnaturelle et nous sert des petites histoires avec une once d’horreur glacée. Pas de quoi empêcher de dormir, et pourtant, un petit frisson de surprise et de crainte traverse l’échine du lecteur dans la seconde partie d’Allô, Hercule Poirot.
Un recueil que je ne regrette pas d’avoir lu !

Et une fois de plus, une couverture d’un Agatha Christie me permet de valider une idée supplémentaire du Challenge des 170 Idées, cette fois, je valide l’idée n°13 :

             Quelques anecdotes sur ce bouquin,
Allô, Hercule Poirot est un recueil "inédit" en France.

mardi 28 juillet 2015

Les Soirées de Médan, de Collectif,

C’est en 1880 que Zola et cinq de ses jeunes amis, Guy de Maupassant, Paul Alexis, Henry Céard, Léon Hennique et J.-K. Huysmans, décidèrent d'écrire chacun une nouvelle et de les publier en un volume sous le titre Les Soirées de Médan.
Le propos de ces textes était certes de faire une œuvre qui soit exemplaire du naturalisme. Et pourtant, de Boule de Suif de Maupassant à l’Attaque du Moulin de Zola, en passant par Sac au Dos de Huysmans, ce livre demeure un joyau de la littérature, de cette littérature du XIXème siècle à laquelle le roman français doit tant.
Quatrième de couverture par Les Cahiers Rouges, Grasset.
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Si j’ai dévoré des classiques anglais, américains et même russes, j’avoue que ma culture des classiques français est un peu (beaucoup) légère à côté. Certes, Zola ne m’était pas inconnu et je connaissais des anecdotes dramatiques de la vie mouvementée de Victor Hugo, mais jamais encore je n’ai lu ces classiques français que les professeurs louent tant et si bien.
Je me suis donc approchée à petits pas furtifs des Soirées de Médan qui réunit cinq nouvelles de cinq auteurs liés par l’amour de la langue française, traitant tous cependant du même sujet : la guerre Francoprusienne de 1870. Si les œuvres ne m’ont pas toutes convaincue, j’ai été très séduite par cette image un peu bohème avec ces cinq artistes réunis dans un vieux salon, discutant, partageant et travaillant tout en s’amusant.
Mais les comptes-rendus suivent dans ma chronique, gardez juste à l’esprit que la note finale n’est pas une moyenne de celles qui suivent mais jauge une impression générale :

Emile Zola et sa famille.

« [...] Et là, heureux de nous de nous trouver d’accord, pauvres d’argent, riches d’enthousiasmes, nous bavardions littérature, [...]. »
P. 10

      L’Attaque du Moulin, d’Emile Zola, 5/5
Pour un premier Emile Zola, j’avoue que le bonhomme a su y faire : une histoire adaptée au format nouvelle, la rendant ni trop longue, ni trop courte. Les descriptions sont imagées, agréables et originales, rien de lourd en somme, sûrement grâce au format.
Mais ce n’est pas juste une jolie petite nouvelle, le thème installe une campagne tranquille menacée par la guerre, l’ambiance retrace donc bien cette opposition et l’histoire se solde même d’une conclusion piquée d’une ironie qui me plaît énormément !
Une excellente rencontre, donc.

      Boule de Suif, de Guy de Maupassant, 5/5
Lui aussi, Guy de Maupassant a laissé une très bonne impression à la néophyte que je suis. Comme chez Zola, on ne s’intéresse pas aux soldats mêmes mais aux citoyens, victimes en fuite, affamés et angoissés.
Plus glauque en ambiance que L’Attaque du Moulin, on traîne dans le froid et la solitude avec des personnages détestables. Tout le côté négatif de la nature humaine finira par ressortir durant la nouvelle.
Une aventure détestable mais que j’aie beaucoup aimé. Après tout, hé, c’est la guerre.

      Sac au Dos, de J.-K. Huysmans, 2/5
Là, j’ai clairement eu un coup de mou.
Le lecteur bascule du côté des soldats, plus précisément du côté du sang-neuf, de jeunes français qui ignorent ce qui les attend.
Si le style n’est pas désagréable, j’avoue que j’ai eue du mal à y voir un intérêt quelconque : le sujet est bien trop vague pour le format de nouvelle et il n’y a pas vraiment d’histoire, juste un semblant de témoignage d’une cinquantaine de pages. Pour être franche, j’avais même l’impression que le récit tournait en rond…
Après, les deux premières nouvelles étaient vraiment excellentes, la déception de Sac au Dos est causée peut-être par un peu de comparaison…

La maison à Médan achetée par Emile Zola et où les cinq auteurs se réunissaient.

      La Saignée, de Henry Céard, 3/5
Là, ça remonte un peu : Céard relance un peu mon intérêt mais pas tant que ça non plus.
Étrange histoire d’amour et de séduction avec un personnage pimpant : Huberte de Pahauën, cette grande femme fausse rousse qui m’a pas mal amusée et ajoute un vrai tourbillon, tantôt comique, tantôt dramatique, ce qui apporte une autre ambiance par rapport aux autres nouvelles mais garde le thème d’une vraie déchéance.
J’ai aimé cette complexité mais j’avoue que j’aie eu un peu de mal avec le style et la fin perdait un peu de son souffle
Donc une bonne nouvelle mais sans plus…

      L’Affaire du Grand 7, de Léon Hennique, 2/5
Seconde grosse déception, j’avoue que je perdais le fil durant cette nouvelle, n’arrivant pas à accrocher à l’intrigue ou au style.
Très franchouillard et manquant d’originalité, je n’ai pas été bien emballée…

      Après la Bataille, de Paul Alexis, 4/5
Finalement, la dernière nouvelle a rattrapé un peu les trois précédentes : assez émouvant et reposant, après un recueil de guerre, Après la Bataille est la nouvelle parfaite pour clore ce livre. 
La rencontre de ces deux étrangers, un soldat du nom de Gabriel Marty et une femme en fuite appelée madame de Plémoran, est pleine d’attrait et de surprises. 
J’ai beaucoup aimé et la conclusion complète le charme.

Les portraits des six auteurs.

Bon, c’est un plus pour la culture générale, c’est sûr, mais je ne retiendrai que deux ou trois nouvelles de ce recueil, les autres ne suivant clairement pas…
Au moins, ça me motive pour lire les auteurs qui m’ont marquée.

             Quelques anecdotes sur ce bouquin,
• Le titre du recueil, Les Soirées de Médan, fait écho à la maison achetée par Zola à Médan, près de Poissy, en 1878.
• Plus tard, plus tard... Quand l’alcool sera retombé et que je serai moins fatiguée, je rajouterai des trucs à dire.

dimanche 30 novembre 2014

Mademoiselle Else, d'Arthur Schnitzler

Mademoiselle Else ou le soliloque tragique d’une femme piégée par les oscillations de l’âme. A travers les mots et les errances désespérées de son personnage, Schnitzler brosse le tableau exemplaire des fascinants déchirements de la morale viennoise au tournant de la modernité, valse – hésitation entre désir et devoir, entre fantasmes de prostitution et rêves de continence. 
Quatrième de couverture par Le Livre de Poche.
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Après Madame Bovary, je vous présente une autre bonne surprise dans une version plus jeune avec Mademoiselle Else, une Bovary à l’autrichienne. Plus court et dans un format bien différent, je me sentais obligée de sélectionner les résumés car certains en dévoilent beaucoup trop.

Déjà, la nouvelle aborde un format nouveau à cette époque et assez étrange qui ne plaît pas à tous les publics : le monologue intérieur. Les dialogues ne sont entendus que d’un seul point de vue, les événements sont aperçus à travers les yeux de cette demoiselle qui nous partage, sans le savoir, ses pensées les plus enfouies. Journal intime oral, confessions du moment, le lecteur est emporté sur ses divagations de jeune femme perdue comme un canoë l’est par des torrents troubles. Le rythme est quelques fois répétitifs mais il est rapide, cinglant et cette nouvelle cache en fait un véritable tourbillon !
Délirante, décalée, drôle malgré elle et tragique, je me suis attachée à cette petite demoiselle Else, figure féminine un peu hystérique et prétentieuse mais attachante, les lectrices se reconnaîtront certainement dans quelques parcelles de cette autrichienne qui croque la vie et fonctionne en accéléré.
Amusant et pourtant profondément tragique, Else préfère rire que pleurer, elle préfère se battre plutôt que de s’enterrer, oser plutôt que se cacher. Mais qui n’a pas rêvé faire des miracles ? Qui ne se construit pas les scénarios les plus délirants sans parvenir à les accomplir ? Else est profondément humaine et est exposée avec ses défauts que l’on partage tous sans se l’avouer.
Les personnages secondaires ne sont malheureusement pas creusés, j’aurais volontiers lu d’autres monologues pensés par Fred, Paul mais surtout le vieux von Dorsday qui démontre autant de défauts humains mais réalistes que la jeune Else. [spoiler concernant la fin] La fin est donc assez frustrante puisque jamais on apprendra la réaction de l’entourage d’Else, ce que penseront ses parents,von Dorsday... Mais après tout, morte, Else non plus ne saura jamais comment se déroulera son enterrement et nous emporte dans son sort malheureux. [/spoiler concernant la fin]

L'auteur qui risque de
rejoindre mes chouchous.
Très psychologique, Arthur Schnitzler a entretenu une longue correspondance avec le célèbre Sigmund Freud qui le voyait comme son doppelgänger (et effectivement, ils se ressemblent étrangement !) et Schnitzler fut même un des premiers lecteurs de L’Interprétation des Rêves. On reconnaît des concepts freudiens et surtout, la même audace que le psychanalyste pour aborder des notions sexuelles chez un esprit si jeune. Mais Schnitzler le fait sans perversité mais plutôt pour disséquer l’âme d’une jeune fille qui passe d’un stade prude à une sorte de liberté dissimulée sans connaître le vrai acte en lui-même, ne connaissant que les flirts innocents.

Si le style m’a quelque peu terrifié au début, j’avoue que je ressors conquise de Mademoiselle Else. Le cœur un peu serré pour cette demoiselle, pour le vieux bonhomme Dorsday et surtout, son auteur talentueux et perspicace mais pourtant durement critiqué à son époque.
Curieux, si vous avez une après-midi de libre, n’hésitez pas à faire connaissance avec Mademoiselle Else et de découvrir un des premiers monologues internes de la littérature autrichienne.

             Quelques anecdotes sur ce bouquin,
• Une anecdote assez tragique et perturbante sur la vie privée d’Arthur Schnitzler qui coïncide étrangement avec la fin de son roman : [spoiler sur le dénouement de Mademoiselle Else] sa fille, Lili, s’est suicidée en 1930, à 18 ans. Selon les témoignages du père lui-même, Lili avait laissé une note qui disait « qu’elle ne voulait pas mourir ». Une triste fin qui ressemble à celle d’Else écrit six ans auparavant. On s’en doute : l’auteur ne s’est jamais remis totalement de ce décès et aurait reçu par la suite des lettres l’accusant d’être responsable, qu’avec l’éduction donnée à Lili, elle finirait forcément comme ça. Arthur Schnitzler meurt finalement en 1931. [/spoiler sur le dénouement de Mademoiselle Else]
• Les thèmes abordés sont vus comme « assez tabous » (encore aujourd’hui, peu d’auteurs oseraient écrire sur la confrontation entre une jeune fille ignorante et un vieil homme qui fantasme sur elle) et beaucoup d’œuvres de Schnitzler ont été détruites par les nazis qui allaient jusqu’à interdire les représentations de ses pièces de théâtre.

jeudi 27 novembre 2014

Absinthes & Démons, d'Ambre Dubois,

Qui est réellement Lord Nermeryl ?
Le diable, comme le laisse sous-entendre la rumeur ? Ou un jeune dandy un peu trop excentrique dont le passe-temps morbide est d’enquêter sur des affaires surnaturelles ?
Au fil des énigmes, en compagnie de sa fidèle compagne, la Corneille, le jeune homme goute la saveur des âmes des âtres humains, découvrant les travers de l’humanité et y apportant sa propre justice... d'une manière bien singulière...
Quatrième de couverture depuis le Site Officiel de lAuteure.
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Charmée par les commentaires toujours très enjoués, intriguée par ce titre alcoolisé et à tendances démoniaques, j’ai emprunté Absinthes & Démons pour le commencer le jour-même, pressée de voir ce qui m’attendrait. Autant vous dire tout de suite : j’ai rendu ce livre sans aucun regret car ce fût une vraie déception.

Déjà, ce sont toutes les louanges sur la plume d’Ambre Dubois qui ont attiré ma curiosité. Mais je me rends compte que ces fameuses louanges devaient venir d’un public facile à satisfaire car j’ai été très surprise : le vocabulaire est pauvre (je ne compte même plus les "prunelles mordorées" qui se pointent toutes les deux pages avec les "sourires cruels"...), des répétitions à foison qui cassent, détruisent le rythme. Je cite juste deux exemples qui m’ont marqués : "De délicates morsures couraient le long de sa nuque et de son torse d’une délicate blancheur" ou "Avec lenteur, elle s’élevait lentement, sans faire un geste ni un mouvement". Les synonymes ne sont pourtant pas durs à trouver et une relecture aurait supprimé ce genre de défaut.
J’ai donc souvent buté durant ma lecture.

Davantage de descriptions de décor
et des détails plus poussés
auraient été les bienvenus…
Forcément, l’ambiance en a pris un sacré coup. Si le thème n’est pas sans intérêt, je n’ai pas été plus emballée que ça : Ambre Dubois mise sur la luxure plutôt que l’horreur, faisant de ses monstres des êtres lubriques plutôt que des dangers pour les mortels, tout en n’assumant pas suffisamment les passages érotiques qu’elle place à chaque nouvelle. Je ne demandais pas les mots "anus" ou "bite", mais enfin, si on pouvait sortir du cliché de l’amour facile et monotone, hein...
Avec tous les amants que se tape Jorian, je pensais voir plus d’originalité ou de diversité (une femme à tendances sataniques, un amant plus réticent au vue des lois interdisant l’homosexualité à l’époque ? C’aurait été plus sympa, non ?), une utilité à ces passages. Cela dit, même hors du lit, la psychologie des personnages fait un peu du surplace : fades et sans distinction, aucun n’a marqué ma mémoire. Pas même le personnage principal, Jorian Nermeryl, tellement agaçant et au charme si lourd, si évident qu’il n’a pas opéré sur moi. En même temps, j’ai toujours horreur des protagonistes qui sentent la perfection…
Il y a juste peut-être la Corneille qui me restera en tête mais sans plus, car bien qu’elle accompagne l’orgueilleux Lord Nermeryl, elle est trop souvent reléguée au second plan.
Certaines lectrices rêvent de rencontrer Jorian, alors que de mon côté, je préférerais plutôt inviter la Corneille à boire un verre…

Bref, c’est bien dommage car j’étais curieuse tout le long du récit, laissant une ultime chance mais au final, il y a comme une impression d’inachevé : leur histoire est avortée, coupée. Pourtant, avec un thème si riche, il y avait quoi creuser plus profondément dans les ténèbres.
Je m’attendais à retrouver des traces d’héritage de Le Fanu, de Baudelaire ou de Poe, je m’attendais à lire une histoire terrifiante mais élégante, sordide mais charmante, une Poppy Z. Brite à l’Ère Victorienne mais j’étais très loin de mes espérances, passant totalement à côté de ce recueil de nouvelles.

Au moins, grâce au titre, je peux valider l’idée n°70 du Challenge des 170 Idées...

             Quelques anecdotes sur ce bouquin,
• Rien pour l’instant, je digère et je cherche quelque chose à partager.

lundi 24 novembre 2014

Les Aventures de Sherlock Holmes [Tome 3], d'Arthur Conan Doyle,


Il vit à Londres, au 221B Baker Street, à la fin du dix-neuvième siècle. Il a des idées un peu bizarres… Il se passionne pour certaines branches de la science. Il est assez calé en anatomie, est un chimiste de premier ordre qui, malgré des études très décousues et excentriques, a amassé un tas de connaissances peu ordinaires. Il n’est pas aisé de le faire parler, bien qu’il puisse être assez expansif quand l’envie lui en prend. Il joue du violon.
Il a un métier : dénouer des énigmes étranges auxquelles il est le seul à pouvoir apporter une solution.
Il a un défaut : il affectionne les drogues.
Il a un ami : le docteur Watson, témoin et narrateur de ses aventures.
Son créateur, Arthur Conan Doyle, a inventé le récit policier moderne.
Il s’appelle Sherlock Holmes.
Quatrième de couverture par Omnibus.
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« — Cela signifie qu’il y a une affaire en cours, je suppose ?
— Oui monsieur ; il est à fond là-dessus en ce moment. Je m’inquiète pour sa santé. Il est de plus en plus pâle et maigre, et il ne mange rien. « Quand désireriez-vous dîner, monsieur Holmes ? » lui a demandé Mme Hudson. « À sept heures et demi, après-demain », a-t-il dit. Vous savez comment il est lorsqu’une affaire l’inspire. »
P. 707

Rencontré il y a maintenant plus de cinq ans, j’avais dans l’objectif d’acheter toutes les nouvelles et tous les romans d’Arthur Conan Doyle qui met en scène son célèbre détective Sherlock Holmes. J’avais opté pour les éditions Omnibus car les trois tomes sont bilingues et y sont représentées les illustrations de Sidney Paget, illustrations d’époque. Depuis, ni Holmes, ni son fidèle Watson n’ont quitté ma vie de lectrice : ils se sont immiscés dans des pastiches, des adaptations, des clins d’œil dans des romans policiers… Et même à un cours de de criminologie de trois heures où l’enseignante mettait l’accent sur les méthodes de déductions et tout ce que l’œuvre de Doyle a apporté à la police (ce n’est pas pour rien si un programme de la police anglaise se nomme HOLMES 2).
Et pourtant, il fallait bien que je finisse par m’en séparer. Ou presque. Si j’ai acheté les trois tomes, c’était pour les lire, et si j’ai dévoré les deux premiers en l’espace de deux ans, j’ai longtemps repoussé la lecture du dernier tome. Ce n’est que grâce au Challenge Écosse que j’ai fini par me pousser un peu au cul et à me lancer dans ces dernières enquêtes.
Je dois dire que j’ai été très surprise : Doyle s’autorise plus d’anecdotes, d’humour et dote même son héros d’un côté plus humain, comme si Holmes en était venu à délaisser son image de cerveau penseur. Placé face à de situations assez sentimentales et violentes, Sherlock Holmes devient plus réaliste que jamais, surtout aux côtés de son ami Watson.
Je n’ai pas regretté cette lecture : Doyle ne perd pas la main dans la construction de mystères intelligents même si il délaisse un peu les méthodes. Mes impressions en détails ci-dessous…
Pour rappeler un peu le premier et le second articles, je note les romans et aventures au cas par cas avec mes impressions, à savoir que la note finale n’est pas une moyenne de toutes les notes ci-dessous, c’est une impression générale.


             • La Vallée de la Peur (titre original, The Valley of Fear, publié en Décembre 1915) 3/5
Dernier roman de Sherlock Holmes, La Vallée de la Peur offre une enquête qui peut s’étendre et se compléter. Je n’ai pas été totalement emballée cependant car le récit se rapproche un peu trop de celui d’Une Étude en Rouge à mon goût, le plaisir de la rencontre en moins.
Doyle nous entraîne tout d’abord dans un décor typiquement anglais : un magnifique château médiéval, des douves humides et des nuits glauques qui, grâce à leur tranquillité et leur silence, permettent à des crimes de s’opérer. Bien sûr, tout ce début était à mon goût, surtout grâce à cette remarque de Watson : l’existence quasi-éternelle d’un château perturbée par un meurtre victorien qui fait l’effet d’une fausse note. Une pointe de modernité qui entache cette fresque médiévale si parfaite.
[Ci-contre, La jeune fille à l’agneau, de Jean-Baptiste Greuze, un tableau au goût d’un redoutable professeur.]
Le mystère est aussi riche que le décor : les indices sont intéressants et les énigmes ne se démêleront pas facilement. La conclusion, en tout cas, ne sera pas uniquement apportée par Holmes, un autre élément s’ajoutera.
Je serai franche : j’ai eu du mal à accrocher à la suite du récit. Le décor bascule trop brusquement et c’était très dur de retrouver le fil tout en gardant en mémoire les indices du début.
Le final rattrape un peu le tout, mais voilà, mon intérêt était bien tassé.
La Vallée de la Peur reste un roman très sympathique mais, quand on a déjà lu Une Étude en Rouge, il y a comme une impression de redondance. D’autant plus que le format n’est, selon moi, pas pleinement exploité par Doyle.

Son Dernier Coup d’Archet,
             • Wisteria Lodge (titre original, The Adventure of Wisteria Lodge, publié la première fois en Août 1908) 4/5
Avec Wisteria Lodge, on se retrouve dans une demeure aussi immense que l’énigme qui fera la joie de Sherlock Holmes et du docteur Watson (enfin, presque pour ce dernier…) : un client suspecté, des rituels macabres, une victime à l’honnêteté questionnable, des intentions décalées et une apparition effrayante et presque surnaturelle ! Bref, Doyle a de quoi occuper son lecteur avec cette nouvelle où les filons sont nombreux et la conclusion est surprenante !
Je regrette juste que, à la façon d’Anne Perry, Doyle délaisse quelques indices qui sont trompeurs, ainsi, l’idée que je me faisais sur l’ambiance était fausse, mais ce défaut est rattrapé par un élément de taille, ou un personnage plutôt : l’inspecteur Baynes. Mais je n’en dis pas plus, cela pourrait gâcher les surprises du personnage~
             Quelques anecdotes sur cette nouvelle,
• Dès le début, Sherlock Holmes fait allusion à La Ligue des Rouquins et Cinq Pépins d’Orange, nouvelles apparues dans les Aventures de Sherlock Holmes.
• C’est une des aventures où Watson annonce une date, 1892, mais Holmes est sensé faire le mort et ne réapparaît qu'en 1894.
             • Le Cercle Rouge (titre original, The Adventure of the Red Circle, publié la première fois en Mars 1911) 3/5
Si Doyle fait toujours preuve d’imagination même dans ce recueil, il faut reconnaître qu’il faut attendre un peu avant d’assister à des prouesses d’originalité : le schéma du Cercle Rouge se rapproche un peu trop de celui de La Vallée de la Peur. [spoiler]On enchaîne trois fois à la suite avec des organisations criminelles[/spoiler] et il y a un effet un peu redondant, un rythme très lassant.
L’énigme est pourtant au départ très captivante avec des indices intrigants, poussant à la curiosité. Mais voilà, le thème m’a quelque peu ennuyée et la fin n’a pas réussi à me recaptiver.

             • Les Plans du Bruce-Partington (titre original, The Adventure of the Bruce-Partington Plans, publié la première fois en Décembre 1908) 3/5
Déjà, le vrai plaisir des Plans du Bruce-Partington, c’est la présence de Mycroft Holmes. C’est d’ailleurs la dernière fois qu’on le rencontre et il faut bien en profiter. Et si cette énigme ne manque pas de charme, la note assez mitigée vient du fait que c’est moi qui ai déconné : persuadée que j’avais déjà lu la nouvelle, j’ai visionné l’épisode de la série Granada. Je me souvenais du tour avec les volets, de l’agitation dans la gare, l’astuce des rails… Bref, je n’avais eu aucune surprise.
Mais le bon signe dans tout ça, c’est que l’enquête est digne des plus célèbres nouvelles de Doyle et que l’adaptation m’a tellement marquée que dès le début de ma lecture, ma mémoire était totalement rafraîchie.
             • Le Détective Agonisant (titre original, The Adventure of the Dying Detective, publié la première fois en Novembre 1913) 4/5
Arthur Conan Doyle ne manque pas d’imagination malgré sa plume assez chirurgicale et pauvre : pour Le Détective Agonisant, le lecteur se retrouve aussi désemparé que Watson devant la détresse d’un Sherlock Holmes mourant à petit feu. Comment le détective agonisant pourrait résoudre une énigme en étant cloué au lit, suant et délirant. Pire : il refuse l’aide de son fidèle ami médecin.
L’énigme est donc complètement éclipsée par cette angoisse et apparaît bien soudainement grâce à un retournement de situation magnifiquement orchestré ! Doyle s’est encore une fois surpassé pour le grand plaisir de ses lecteurs.
Une excellente nouvelle qui répondra aux attentes des curieux.

             • La Disparition de Lady Frances Carfax (titre original, The Disappearance of Lady Frances Carfax, publié la première fois en Décembre 1911) 5/5
Si on aborde souvent le vol ou le meurtre, Doyle n’a pas tellement utilisé le thème de la disparition et pourtant, lorsqu’une victime est kidnappée, il nous sert un p’tit bijou : je pense à L’École du Prieuré par exemple, mais je pourrais maintenant citer La Disparition de Lady Frances Carfax.
Mouvementée et complète, l’enquête réserve de nombreuses surprises et ne fera pas bâiller son lecteur. Le rythme ne s’essouffle même pas au bout et offre même une conclusion qui fait froid dans le dos, distillant un peu d’horreur dans ce monde criminel… Encore une preuve que Sherlock Holmes, contrairement à son frère Mycroft, a tout intérêt à s’activer quand il est sur un mystère.
Une excellente nouvelle qui pourra satisfaire les connaisseurs comme les moins aguerris des histoires de Doyle.

             • Le Pied-du-Diable (titre original, The Adventure of the Devil’s Foot, publié la première fois en Décembre 1910) 3/5
À la fois terrifiante et intrigante, Le Pied-du-Diable est un mystère aux éléments très complexes. Si les motifs ne sont pas vraiment obscurs, c’est l’arme du crime qui surprendra les lecteurs : pervers et ingénieux, Doyle ajoute des candidats à sa collection de criminels dangereux.
La conclusion n’était pas vraiment à mon goût à cause d’un élément mélodramatique qui était peut-être un peu de trop pour moi… Mais je retiendrai cette nouvelle dans tous les cas grâce à son côté effrayant.
             Quelques anecdotes sur cette nouvelle,
• Parfois traduite "LAventure du Pied du Diable".
•  Dans sa liste des 12 meilleures nouvelles de Sherlock Holmes, Sir Arthur Conan Doyle place Le Pied-du-Diable à la neuvième place.
             • Son Dernier Coup d’Archet (titre original, His Last Bow, publié la première fois en Septembre 1917) 2/5
Oulah ! Comme j’ai été perturbée par cette (trop) longue introduction à propos d’espionnage. J’avais pourtant hâte d’arriver à ces nouvelles car j’étais curieuse de voir la transition les séduisantes années 1880 vers celles, nettement plus sombres, qui précèdent la Guerre de 14-18. Et bien j’ai été assez déçue… Je m’attendais à une ambiance paranoïaque, des craintes capables de transpercer les deux héros populaires, un ciel gris qui précède un orage violent et terrifiant mais finalement, rien de tout ça !
Je regrette que Doyle n’ait pas exploré le thème de la guerre imminente (surtout du point de vue d’un ancien soldat comme Watson) et j’ai donc très vite oublié l’énigme dont le déroulement est assez floue, puisque le détective et son fidèle compagnon apparaissent bien trop tard…
Boh. Tant pis…
             Quelques anecdotes sur cette nouvelle,
• La traduction française ne permet pas le jeu de mots qu’utilise Doyle : His Last Bow peut vouloir dire Son Dernier Coup d’Archet comme Sa Dernière Révérence. C’est la première traduction qui est habituellement gardée, en clin d’œil à la passion d’Holmes pour le violon.
source
Les Archives de Sherlock Holmes,
             • L’Illustre Client (titre original, The Adventure of the Illustrious Client, publié la première fois en Novembre 1924) 5/5
Arthur Conan Doyle reprend du poil de la bête et ça fait plaisir, car si L’Illustre Client m’a fait quelques fois penser à Un Scandale en Bohème, cette nouvelle peut se targuer d’être originale et addictive. La petite touche de suspense se marie très bien au côté humain exploité chez les personnages, qu’on les connaisse ou non.
Les thèmes romantiques s’entrechoquent dans L’Illustre Client : un croqueur de femmes, une vengeance passionnelle, un amour destructeur… Les personnages secondaires sont complètement animés par des sentiments très vifs et il s’agit certainement de la seule nouvelle où Holmes et Watson se retrouvent piégés dans ce tourbillon expressif de haine, les réactions des éléments leur échappant à plusieurs reprises.
Vous l’aurez compris, j’ai adoré cette nouvelle qui, malgré l’absence de mystère, reste néanmoins surprenante et capte l’attention du lecteur.

             • Le Soldat Blafard (titre original, The Adventure of the Blanched Soldier, publié la première fois en Octobre 1926) 2/5
Si le choix de la narration était très intéressante, j’avoue que j’ai été assez déçue par Le Soldat Blafard. J’ai eu l’impression de tourner un peu en rond au bout de quelques pages et la solution, bien qu’attendrissante, n’est pas spectaculaire et fait retomber la nouvelle à plat. Sans compter que le happy-ending était un peu de trop.
Le véritable avantage avec Le Soldat Blafard est la proximité du lecteur avec Holmes : descriptions acerbes, pensées amusantes… On redécouvre le célèbre personnage et on se rend compte que l’automate possède non seulement un cerveau actif mais aussi un cœur en or. 
             Quelques anecdotes sur cette nouvelle,
• Il s’agit de la première nouvelle narrée par Holmes lui-même.
             • La Pierre de Mazarin (titre original, The Adventure of the Mazarin Stone, publié la première fois en Octobre 1921) 5/5
Voilà un autre coup de cœur dans ce recueil avec La Pierre de Mazarin : des situations comiques mais intenses, des retournements de situation théâtrales, des dialogues dynamiques… Dur de s’ennuyer avec cette nouvelle où j’ai adoré chaque élément. J’avais remarqué que Doyle se permettait de doter ses personnages d’un sens de l’humour plus prononcé, accentuant aussi leur humanité et La Pierre de Mazarin confirme cette impression que j’avais : Holmes est plus excentrique que jamais, surtout ici.
Ce n’est pas l’énigme mais les tactiques du détective qui vous feront chauffer les méninges.
J’en garderai un excellent souvenir et sera une des nouvelles que je relirai avec un grand plaisir !
             Quelques anecdotes sur cette nouvelle,
• Il s’agit de la première nouvelle narrée par un narrateur totalement extérieur au récit (hétérodiégétique, si vous voulez briller en société). Un choix qui permet des possibilités de narration sans ambiguïtés.
             • Les Trois-Pignons (titre original, The Adventure of the Three Gables, publié la première fois en Septembre 1926) 2/5
Bon, en tout franchise, je ne garderai pas un souvenir impérissable de cette nouvelle que j’ai trouvé assez plate, brouillon et obscure. Seuls les personnages apportent la touche d’intérêt dans Les Trois-Pignons, même le duo célèbre reste touchant et on ne se lasse toujours pas de leur alliance ingénieuse.
Mais voilà, une aventure dont peuvent se passer les plus timides lecteurs de Doyle…

             • Le Vampire du Sussex (titre original, The Adventure of the Sussex Vampire, publié en Janvier 1924) 4/5
Les fins connaisseurs n’ignorent pas qu’Arthur Conan Doyle, médecin et enquêteur non confirmé, s’est beaucoup intéressé au surnaturel à la fin de sa vie, comme bon nombre de compères à cette époque. Entre la mode des clichés post-mortem et les légendes urbaines qui font la popularité de l’Angleterre, même un scientifique comme Doyle ne pouvait pas résister aux charmes du fantastique et je suis bien contente de voir qu’il a osé confronter son détective cartésien à un mort-vivant imaginaire.
Toutefois, comme pour le Chien de Baskerville, le lecteur ne doit pas s’attendre à une conclusion magique mais bien à une réponse terre-à-terre : on reste dans le domaine de la science, dans le pur concret. Sauf que cela n’enlève rien à la qualité du mystère, ni à l’esthétique du délit et encore moins au côté touchant de la conclusion.
Une nouvelle intéressante, originale et très émouvante qui répondra aux attentes des grands lecteurs doyliens.

Les clichés post-mortem étaient particulièrement populaires pendant l’Ère Victorienne 
et les familles pensaient conférer un semblant d’immortalité à leurs disparus.

             • Les Trois Garrideb (titre original, The Adventure of the Three Garridebs, publié la première fois en Octobre 1924) 5/5
Une nouvelle que j’ai adoré grâce à ses notes humoristiques (il n’y a qu’à voir la situation cocasse du début) et ses moments intenses : ceux qui veulent une preuve de l’amitié qui rattache Holmes et Watson, lisez Les Trois Garrideb, vous ne serez pas déçu.
Le criminel m’a aussi plu car particulièrement audacieux et tordu, se démarquant de ses compères, rendant l’énigme très difficile à percer.
À lire pour le plaisir !

             • Le Pont de Thor (titre original, The Problem of Thor Bridge, publié en Mars 1922) 4/5
Bien que sympathique, Le Pont de Thor est un récit que je juge un peu plat. Ce qui est dommage vu la qualité de l’énigme qui se rapproche beaucoup du style d’Agatha Christie au passage : les fans d’Hercule Poirot et de Miss Marple seront sûrement enchantés de la tragédie entre madame Gibson et mademoiselle Dunbar. La platitude vient surtout du manque d’indice et de la résolution à tendances abracadabrantes du mystère.
Toutefois, je ne regrette pas cette lecture mais un petit détail manquant fait que la nouvelle aurait pu être un véritable coup de cœur.

             • L’Homme qui rampait (titre original, The Adventure of the Creeping Man, publié la première fois en Mars 1923) 3/5
Loin de L’Estropié (The Crooked Man dans le titre original) dans Les Mémoires de Sherlock Holmes ou encore de L’Homme à la Lèvre Tordue dans Les Aventures de Sherlock Holmes, on assiste à un vrai cas de contorsionniste dans L’Homme qui Rampait ! À tel point que j’ai eu l’impression de lire une nouvelle d’Edgar Poe ou de Stephen King.
Il n’y a pas tellement de délit, juste un sombre mystère où un homme est désincarné et ressemble à un animal étrange, un monstre rampant.
La solution est intéressante mais assez facile en réalité. Une nouvelle très sympathique mais qui peut être ignorée, sauf si vous voulez lire le canon entier.
             Quelques anecdotes sur cette nouvelle,
• Traduit aussi en "L’Homme qui rampait".
• À la page 903, il y a une référence aux Hêtres-Dorés, nouvelle qui est rangée dans Les Aventures de Sherlock Holmes.
             • La Crinière du Lion (titre original, The Adventure of Lion’s Mane, publié la première fois en Novembre 1926) 3/5
Après toutes ces nouvelles, on pourrait penser que Doyle ne puisse plus nous surprendre. Et pourtant ! La Crinière du Lion est vraiment originale et se démarque de toutes les autres aventures de Sherlock Holmes. On change aussi de décor : Doyle nous permet de visiter le lieu de retraite de son détective et de rencontrer rapidement ses nouveaux compagnons, Watson ne l’ayant pas rejoint dans les Cornouailles.
Bien sûr, personne ne peut surpasser le sympathique médecin mais ce paysage en bord de plage change et apporte une touche de nouveauté. Même l’énigme est inhabituelle, tout comme le coupable…
Mais je n’en révèle pas plus pour ne pas gâcher les effets de surprise. Pourtant, si je suis presque tombée de ma chaise, quelque chose fait que je n’ai pas réussi à accrocher davantage à La Crinière du Lion
             Quelques anecdotes sur cette nouvelle,
• Il s’agit de la seconde et dernière nouvelle narrée par Holmes lui-même.
Les magnifiques couvertures des éditions Penguin pour 
La Vallée de la Peur, Son Dernier Coup d’Archet et Les Archives de Sherlock Holmes.

             • La Pensionnaire Voilée (titre original, The Adventure of the Veiled Lodger, publié la première fois en Janvier 1927) 5/5
La Pensionnaire Voilée est une nouvelle un peu particulière qui s’adresse plus aux lecteurs confirmés qu’aux nouveaux curieux : si il y a quelques mystères, ils seront servis sur un plateau et Holmes ne démontrera pas ici sa science de la déduction. Peut-on classer La Pensionnaire Voilée comme un policier ? Je le classerais plutôt dans la section dramatique car la dimension humaine occupe une très grande place : la cliente est particulièrement émouvante et son histoire ne peut laisser insensible, même pas un ancien soldat comme Watson ou un détective comme Holmes. Forcément, j’ai beaucoup aimé cette confrontation entre ces hommes et la détresse d’une telle femme, très loin de la relation enquêteurs-cliente.
Une histoire qui marque non grâce à ses énigmes (bien qu’elles soient intéressantes) mais par sa conclusion et sa cliente exceptionnelles.

             • Shoscombe Old Place (titre original, The Adventure of Shoscombe Old Place, publié la première fois en Mars 1927) 4/5
J’avoue que j’ai eu très peur lors du début, avec cette conversation sur les courses de chevaux car je me souviens que Flamme d’Argent, dans Les Mémoires de Sherlock Holmes, m’avait profondément ennuyée. Et finalement, ce n’est pas une question de courses, pour mon plus grand bonheur ! On tombe même plutôt dans le macabre avec une vérité peu reluisante et complexe qui se dévoile grâce à des indices logiques.
Une excellente surprise.

             • Le Marchand de Couleurs Retraité (titre original, The Adventure of the Retired Colourman, publié la première fois en Décembre 1926) 4/5
Le recueil touche à sa fin mais Arthur Conan Doyle reste fidèle à lui-même avec cette nouvelle qui mérite sa place aux côtés des plus grandes aventures, des plus connues : des tours de passe-passe, des indices logiques avec des révélations adéquations, un coupable étrange et mémorable… Et surtout, un Watson au devant de la scène comme dans La Cycliste Solitaire. Ça fait toujours plaisir à voir quand Watson prend aussi les devants et mène une partie de l’enquête.
Une très bonne nouvelle qui m’a surprise jusqu’au bout.

             • La Boîte en Carton (titre original, The Adventure of the Cardboard Box, publié en Janvier 1893) 4/5
Écrit bien avant les nouvelles de ce troisième tome des éditions Omnibus, on retrouve nettement l’ambiance des débuts de Doyle avec une ère Victorienne bien plus marquée. Ce qui est un bel avantage si on considère le côté assez gore de la nouvelle qui m’a rappelé un petit peu L’Aliéniste.
Sordide et brutale, La Boîte en Carton aborde des sujets sensibles et plutôt sombres, n’enviant rien aux détails croustillants d’un fait-divers réel. Bien sûr, les éléments de départ sont très intrigants et mènent vers un mystère complet bien que simple.
Cette dernière nouvelle lue me marquera par sa finalité et sa qualité.
             Quelques anecdotes sur cette nouvelle,
• Bien que publié dans le Strand en Janvier 1893, la nouvelle La Boîte en Carton n’a pas été retenue dans le recueil des Mémoires de Sherlock Holmes, elle n’a rejoint ses consœurs qu’avec l’édition américaine. Choix d’Arthur Conan Doyle ou des éditeurs ? Ce n’est pas clair si ce n’est que les personnes à l’époque avaient jugé la nouvelle trop explicite.

Afternoon, par Suwi, pour finir sur une note douce et tranquille.

Ce n’est pas ni roman, ce n’est pas une nouvelle mais c’est une lettre. Un dernier petit mot alors sur cette fameuse lettre qui est supposée être la dernière que Watson ait reçu d’Holmes. Autant vous dire que cette minuscule et bête indication m’a achevée, me tirant quelques petites larmes car vous savez ce qu’on dit : finir un livre, c’est comme perdre un ami. Forcément, finir cette longue saga me laisse un gros vide dans le cœur semblable à celui que j’avais ressenti en lisant le dernier tome d’Harry Potter.
Que puis-je dire d’autre si ce n’est que c’est bien fini et qu’il ne me reste plus qu’à porter le deuil avec des pastiches ?

Au revoir messieurs Sherlock Holmes et John Watson, vous allez énormément me manquer.

Ainsi, je termine mon Challenge Sherlock Holmes, ayant lu toutes les nouvelles et tous les romans du canon. Grâce à la nationalité d’Arthur Conan Doyle, je boucle aussi mon Challenge d’Écosse in extremis. Et enfin, je tenais à réserver l’idée n°66 du Challenge des 170 Idées, faisant honneur au nez en bec-d’aigle du plus célèbre détective d’Angleterre :

             Quelques anecdotes sur ce bouquin,
• Contrairement aux tomes 1 et 2, Omnibus n’a pas respecté l’ordre chronologique dans ce troisième tome. J’ai remarqué aussi un petit relâchement au niveau de la traduction avec pas mal de fautes d’orthographe, mais bon, lisant aussi la version anglaise, je n’y ai pas prêté plus attention.
• Pour ceux que cela intéresse : chronique du tome 1 et chronique du tome 2.