vendredi 30 juin 2017

Autobiographie d'une Courgette, de Gilles Paris,

« Elle ressemble à une poupée de chiffon toute molle et ses yeux sont grands ouverts. Je pense aux films policiers où des tas de femmes se font tuer et après elles ressemblent à des tas de chiffons toutes molles et je me dis “c’est ça, j’ai tué maman.” »
Ainsi commence l’aventure d’Icare, alias Courgette, un petit garçon de neuf ans. Paradoxalement, la vie s’ouvre à lui après cette tragédie. Placé dans un foyer, il pose avec une naïveté touchante son regard d’enfant sur un monde qu’il découvre et qui ne l’effraie pas. De forts liens d’amitié se créent entre et ses camarades. Et puis, il tombe amoureux de Camille…
Quatrième de couverture par J’ai Lu.
---

« On va s’asseoir dans l’herbe au bord de la rivière.
– T’as pas froid ? dit Raymond.
– Non.
Et il enlève son blouson et il m’enveloppe dedans. Des fois les grandes personnes, ça écoute que dalle. »
P. 54

J’ai toujours beaucoup admiré l’écriture de Mathias Malzieu : cette capacité à aborder des sujets adultes avec une plume enfantine fait que chaque histoire du chanteur de Dionysos est un plaisir à double intonation. Mais je me rends compte, après ma lecture d’Autobiographie d’une Courgette, que Gilles Paris possède également ce talent.
Autobiographie d’une Courgette est un de ces curieux mélanges : un sujet difficile avec une narration innocente. La naïveté ne cache pas la tristesse mais l’accompagne, elle lui donne une autre allure. Et finalement, Autobiographie d’une Courgette donne plus envie de sourire que de pleurer.

Ce roman aborde un thème qui me touche : les enfants en foyers. Ceux qui n’ont plus d’amour et sont trop vieux (à 9 ans !) pour être adoptés. J’ai été émue par chaque enfant, aussi bien Courgette, Simon, Béatrice, Alice, Ahmed (j’avoue, j’ai ri énormément à cause des pleurs récurrents du petit Ahmed qui ont un côté comique avec la narration de Courgette), les deux frères qui jouent au jeu du dictionnaire… Et bien sûr, Camille, mais ironiquement, c’est celle que j’ai le moins aimée.
Un sujet assez difficile mais loin de faire pleurer : ce roman est espiègle, donne le sourire, fait du bien. Comme le premier éclat de rire après une période particulièrement difficile. Il y a un humour agréable, bien que le ton « enfant » peut rebuter : il faut s’y habituer, mais une fois le ton adopté, on arrive à apprécier cette narration proche de celle d’un enfant de 9 ans et qui répète « et… et… et… et… et… ».

Il se finit toutefois de façon assez abrupte et je n’ai pas approuvé tous les choix scénaristiques… [spoiler] Que Raymond adopte Courgette et Camille, d’accord, mais en sachant que les deux sont amoureux… Ce n’est qu’une amourette si ça se trouve, mais j’ai trouvé un côté un peu malsain. Ensuite, la facilité avec laquelle le fils de Raymond accepte son nouveau frère et sa nouvelle sœur : certaines familles ont cette chance de pouvoir réunir les membres qui ne partagent pas toujours le même sang, mais d’expérience et celle des autres, c’est une aubaine rare. [/fin du spoiler]
Hormis ça, c’est une lecture très sympathique que je ne regrette pas et je garderai un bon souvenir du petit Icare, pardon ! Courgette et de ses copains qui vont me manquer…
« L’église, c’est la maison au bon Dieu qui y est jamais.
Ça m’étonne pas, vu qu’il fait toujours méga froid dans sa maison. Le bon Dieu, Il est pas idiot, Il est bien au chaud dans les nuages avec le soleil qui Le chauffe au-dessus et Il se protège des gens qui ont toujours un truc à Lui demander.
– Surtout de l’argent, dit Simon. »
P. 89

             Quelques anecdotes sur ce bouquin,
• C’est auprès des Pressoirs du Roy, avec sa directrice Jacqueline Vialatte et l’équipe, que Gilles Paris a recueilli des conseils afin d’écrire Autobiographie d’une Courgette.
• Je conseille vivement le film qui adapte ce roman : c’est une petite perle d’animation qui ne dure qu’une heure mais qui fait rêver tout du long.

mercredi 28 juin 2017

Héros ou Couple inoubliables [21],

              

Organisé par Cassie56, le rendez-vous hebdomadaire Héros ou Couple Inoubliables permet de laisser une trace, un article à propos d’un personnage héroïque ou d’une romance qui vous a marqué, ému ou ravi en répondant à trois questions.
Aucun jour n’est fixé, mais j’ai opté les mercredis pour mon blog.






    → Pourquoi ce personnage ?
Bessy Buckley, de son vrai nom Daisy O’Toole, est la meilleure narratrice d’un roman qui se déroule au XIXème siècle, juste derrière Jane Eyre.
      → Est-ce le personnage principal ?
Oui, unique narratrice de La Servante Insoumise, sa propre histoire.
      → Quel aspect particulier du personnage vous a tant plu ?
Son authenticité : le roman a été écrit dans les années 2000 et se déroule dans les années 1860, forcément, j’ai tout d’abord été choquée par le langage très décontracté. Et puis finalement, après réflexion, je me disais que tout le monde ne parlait pas de façon correcte à l’époque, Bessy a été élevée dans les bas-fonds irlandais et à dix ans, elle en a vu plus que la plupart des femmes qui ont la cinquantaine. Et une fois habituée, le contexte historique se pose sans heurt.
La psychologie du personnage va plus loin : véritable enfant-femme, Bessy a besoin d’un modèle maternel et, bien que servante, elle ne cherche que l’approbation de sa patronne Madame Reid. Cette relation ajoute une dimension et le lecteur s’attache à ce bout de femme.
Bessy n’est pas parfaite : elle peut être capricieuse, jalouse, désinvolte, impulsive... Mais elle fait vraie, authentique. Et la fin montre qu’il s’agit d’une jeune femme sensible et qui sait se montrer généreuse.

lundi 26 juin 2017

La Légende du beau Pécopin et de la belle Bauldour, de Victor Hugo,

Dans une contrée germanique du Moyen-Âge, le beau Pécopin et la belle Bauldour s’aiment d’un amour partagé et leurs pères les ont fiancés. Grand chasseur, le jeune homme est souvent absent et sa belle, grande fileuse, se désennuie auprès de sa quenouille en attendant que le mariage les unisse pour toujours. Mais alors qu’approche le jour des noces et que tous les deux s’en réjouissent, dans une clairière Pécopin rencontre un comte et sa troupe de cavaliers : éblouis par son talent de chasseur, ils l’enrôlent pour une longue aventure loin de la belle Bauldour.
Quatrième de couverture par Le Livre de Poche.
---

J’adore le Moyen-âge, j’adore le XIXème siècle, j’adore Victor Hugo. Alors un texte qui réunit ces trois passions, ça donne quoi ? Une excellente lecture.
Victor Hugo a écrit La Légende du beau Pécopin et de la belle Bauldour dans un double-esprit : parodier les textes médiévaux et leur rendre hommage. Comme ceux d’aujourd’hui, les lecteurs du XIXème avaient perçu le côté un peu burlesque des légendes du Moyen-âge, mais les romantiques tenaient ces récits ancestraux en haute estime, et Victor Hugo laisse deviner un certain attachement également.


Outre le talent d’imiter la narration du XIIème siècle tout en modernisant son histoire, Victor Hugo, comme à son habitude, démontre un humour déconcertant (surtout quand on le compare avec toutes les photos qui le montrent avec sérieux, voire morosité) : La Légende du beau Pécopin et de la belle Bauldour fait rire, réjouit mais ne pousse pas à la moquerie. C’est vraiment un texte qui séduira les médiévistes, adeptes des amours courtois, jusqu’a satisfaire les passionnés du XIXème et de Victor Hugo, même si cela nécessitera une lecture plus profonde.

Une excellente lecture où je ne me suis pas ennuyée une seule fois, avec une fin renversante. La Légende du beau Pécopin et de la belle Bauldour est aussi surprenante que celles, plus anciennes, qui ont bercé notre enfance et avec un charme unique, unique car capable d’associer deux époques totalement différentes.


             Quelques anecdotes sur ce bouquin,
• Malgré la renommée de l’auteur, La Légende du beau Pécopin et de la belle Bauldour est très peu connue : pourtant publié de son vivant et sans être rattaché à un recueil, cette parodie du Moyen-âge est certainement l’une des (rares) œuvres de Victor Hugo où les articles sont assez rares (et pas une seule fois mentionnée sur la page Victor Hugo de Wikipédia).
• Comme la majorité des œuvres publiées au XIXème siècle, vous pouvez trouver La Légende du beau Pécopin et de la belle Bauldour gratuitement sur internet. Le texte est assez court, donc c’est moins fastidieux à lire que tout Notre-Dame de Paris sur une page web, n’hésitez pas !


jeudi 22 juin 2017

L'Homme Invisible, d'H. G. Wells,

C’est un drôle de client qui s’est installé à l’auberge de Mme Hall ! Vêtu d’un grand chapeau, de lunettes noires et recouvert de bandages tout autour de la tête, l’inconnu s’est enfermé dans sa chambre avec des dizaines de petites bouteilles remplies de poudre et de liquides divers.
Que prépare-t-il ? Une chose est sûre, les villageois sont loin d’être rassurés !
Quatrième de couverture repris sur LivrAddict.
---

Petite, j’étais fascinée par le vieux film de L’Homme Invisible datant de 1933 : cet homme recouvert de bandages, habillé de son propre mystère intrigue. Il attire alors que son caractère abject repousse. Je me souvenais de cette impression, mais seulement vaguement. Et comme le film a totalement déserté ma mémoire, j’en ai donc profité pour redécouvrir cette histoire avec la plume du créateur, celle d’H. G. Wells.

Malheureusement, la première chose que je déplore est justement cette plume : je ne sais pas si elle vient de la traduction (qui n’est pas toujours fameuse dans les œuvres libres de droits que l’on peut trouver gratuitement sur le net), mais j’ai trouvé certains passages brouillons, d’autant plus que les scènes de lutte sont nombreuses, ce qui n’aide pas, et une absence totale de charme… Pas de descriptions d’environs, pas d’atmosphère, pas d’efforts littéraires notables. Des articles de journaux sont écrits avec plus de cœur…

Par contre, L’Homme Invisible s’inscrit parfaitement dans les prémices de la science-fiction. Et puis, quitte à avoir une écriture chirurgicale, autant aller dans le détail qui frôle la science. Je ne m’attendais donc pas à avoir une explication sur le comment devenir invisible, et pourtant, Wells s’y risque, rappelant les découvertes atomiques qui ont marqué son siècle ! Un bel effort d’imagination et, comme le veut le genre, on en vient à se demander durant la lecture si ce phénomène ne serait pas effectivement possible ?


Le film a fait de ce scientifique une des icônes « monstrueuses » d’Hollywood au début du XXème siècle, mais L’Homme Invisible n’est pas un roman effrayant, j’en attendais malheureusement trop sur sa capacité à faire frissonner. Cette nouvelle a plutôt tendance à heurter, non à faire frémir : le scientifique agace et offense, mais il aurait pu être encore plus terrifiant (être attaqué par une chose invisible, voilà de quoi perturber).

C’est tout de même une lecture que je tenais à faire avant de revoir le film de 1933 et je ne la regrette pas malgré tout.

             Quelques anecdotes sur ce bouquin,
• Aujourd’hui, c’est surtout le film de 1933 qui est connu, à l’instar du Dracula de 1931 avec Bela Lugosi ou le Frankenstein de la même année avec Boris Karloff : Griffin rejoint donc les fameux Universal Monsters. Et entre nous, je le trouve bien plus charismatique dans cette adaptation que dans la nouvelle d’origine.









mercredi 7 juin 2017

Héros ou Couple inoubliables [20],

              

Organisé par Cassie56, le rendez-vous hebdomadaire Héros ou Couple Inoubliables permet de laisser une trace, un article à propos d’un personnage héroïque ou d’une romance qui vous a marqué, ému ou ravi en répondant à trois questions.
Aucun jour n’est fixé, mais j’ai opté les mercredis pour mon blog.






    → Pourquoi ce couple ?
Car j’ai vraiment été touchée par ce couple durant ma partie : l’émotion vient en grande partie de la musique The Poet and The Muse, et je tenais à les inscrire dans les couples inoubliables.
    → Est-ce le couple principal ?
Pas vraiment : le couple principal est celui entre Alan et Alice Wake, mais enfin, j’ai nettement préféré ce couple en arrière-plan.
    → Quel aspect particulier de la relation vous a tant plu ?
Le côté clair-obscur de ce couple : avec The Poet and The Muse, on comprend tout l’amour qui liait Thomas et Barbara. Le fait qu’ils se retrouvent séparés non pas à cause de la mort (puisque Barbara meurt en se noyant) mais des pouvoirs occultes du lac ne brise pas leur relation : Barbare représente l’ombre, la noirceur, Thomas représente la lumière, l’éclat qui trouble presque. Et comme on se rend compte à la fin du jeu : ces deux forces sont complémentaires, elles ont besoin de l’une et de l’autre pour exister. Comme pour un couple.
Et j’ai trouvé ce contraste personnifié très beau.

(Et puis, je n’oublie la dame à la lumière, amoureuse de Thomas Zane, celle qui est devenue folle avec la nuit)