Une abbaye bénédicte peut-être décemment attirer les foules sans reliques consacrées ? Non, répond le prieur de Shrewsbury, en cet an de grâce 1138 […]. Qu’à cela ne tienne, le pays de Galles voisin a des saints pour chaque jour de l’année et même plus !Sainte Winifred, bien négligée par ses voisins, apparaît alors à un jeune moine.Un signe du ciel. L’abbaye envoie donc une délégation au village gallois. Lequel n’entend pas se faire enlever sa sainte, comme le proclame haut et fort le seigneur du lieu… qui meurt le lendemain. Vengeance divine ou bien les hommes s’en sont-ils mêlés ?
Quatrième de couverture par 10/18.
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« Quelque chose de petit, rond et dur tomba d’entre les feuilles au-dessus de lui, juste au milieu de sa tonsure. [Frère Cadfael] porta la main à sa tête, et dit quelque chose d’inattendu pour un moine. »
P. 42
Il se trouve que je suis toujours une grande amatrice d’enquêtes menées par des moines, mais entre Erwin le Saxon de Marc Paillet et frère Athlestan de Paul Doherty, le plus connu de ces limiers qui portent la bure reste tout de même frère Cadfael, bénédictin gallois qui a fait la popularité de son auteure, Ellis Peters.
Après une première tentative de lecture pas franchement encourageante (je n’ai pas été au-delà des trente premières pages), j’ai attaqué de nouveau Trafic de Reliques et finalement, je suis ressortie plutôt conquise !
La série a été adaptée à la télévision avec Derek Jacobi dans le rôle principal de frère Cadfael.
Pourquoi avais-je abandonné ce livre lors du premier essai ? Le début un peu fouillis n’avait pas réussi à me captiver et j’avais grincé des dents à la page 25 « Faites marcher vos petites cellules grises », car bon, des moines qui parlent de cellules grises au XIIème siècle, ça revient un peu à du blasphème.
J’ai donc pardonné cet anachronisme à ma seconde lecture, me raccrochant à l’idée que c’était peut-être une allusion aux cellules grises d’Hercule Poirot, mais enfin, il faut reconnaître que même si le charme médiéval est entretenu dans ce premier tome, Trafic de Reliques n’est pas très transportant et offre peu de détails sur la vie dans les années 1100.
C’est même dommage que le côté religieux ne soit pas plus exploité et mieux illustré (on ne connaît pas tous la hiérarchie d’un monastère ou la différence entre un prieur et un frère lai par exemple…) mais l’auteure arrive tout de même à jouer habilement avec cet élément ([spoiler sur la conclusion] je pense surtout à comment Cadfael déguise la mort involontaire du coupable, frère Columbanus, en faisant croire que sa disparition est un miracle : après avoir disposé les vêtements du moine sur un prie-Dieu et avoir éparpillé des pétales blancs à la place du corps [/fin du spoiler sur la conclusion]).
Mais là où j’accorde un réel bon point à Ellis Peters, c’est qu’elle utilise la cruentation dans son enquête, cette vieille croyance qui raconte que les plaies d’une victime ressaignent si son assassin s’approche d’elle. C’est tout bête, mais l’association énigme et histoire était très bien trouvée. C’est triste que ce soit l’unique coup de maître historique…
[ci-contre, Saints Jerome and John the Baptist peints pas Masolino en 1428.]
Par contre, pour ce qui est de l’enquête, même si certains indices me mettaient trop la puce à l’oreille, on sent qu’Ellis Peters maîtrise son sujet et ne confond pas son siècle avec celui de son moine enquêteur. L’enquête est claire, bien construite et l’auteure a la bonne idée de ne pas torcher sa conclusion et nous dévoile les répercussions de son intrigue (n’est-ce pas, Anne Perry ?).
Le tout est d’ailleurs raconté avec une plume très agréable et fluide, un style que j’ai beaucoup apprécié.
Alors certes, ce n’est pas un coup de cœur renversant, on est loin d’un Millénium médiéval ou du Nom de la Rose mais je dois reconnaître que j’ai passé un très bon moment avec ces personnages plein de vie, un moine-protagoniste qui sort du cliché et ajoute un peu de piment et que je ne regrette donc pas d’avoir les tomes deux et trois dans ma bibliothèque.
Je valide donc pour frère Cadfael : Erwin le Saxon vient de rencontrer son concurrent.
Je peux raccrocher cette chronique à l’idée n°10 du Challenge des 170 Idées et au Challenge Moyen-âge.
Quelques anecdotes sur ce bouquin,
• Les éditions 10/18 considèrent Trafic de Reliques comme le troisième tome de la série de Frère Cadfael, après Un Cadavre de Trop et Le Capuchon du Moine mais Ellis Peters a écrit les trois tomes dans cet ordre : Trafic de Reliques, en 1977, Un Cadavre de Trop en 1979 et Le Capuchon du Moine en 1980. Si vous commencez à lire par Trafic de Reliques, vous ne serez absolument pas perdu.
• Si l’ambiance historique n’est pas spécialement travaillée, celle religieuse l’est et j’ai laissé ici un petit lexique qui pourra aider certains lecteurs [à venir !].
• Comme beaucoup d’autres sagas, 10/18 réédite actuellement les couvertures :
• Comme beaucoup d’autres sagas, 10/18 réédite actuellement les couvertures :
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