Le 17 Février 1970, aux États-Unis, deux jeunes filles et leur mère enceinte sont retrouvées assassinées dans l’appartement familial. Le père, Jeffrey MacDonald, s’en sort avec quelques blessures légères. Blanchi dans un premier temps, l’homme est rattrapé par l’affaire quelques années plus tard. Il croise alors la route de Joe McGinniss, un célèbre écrivain-journaliste en quête d’un nouveau best-seller. Les deux hommes s’entendent sur un projet de livre. À l’annonce du verdict qui condamne MacDonald à trois peines de prison à vie, McGinniss fond en larmes, comme tous les membres de la défense. Incarcéré, MacDonald entame une longue correspondance avec son « ami » écrivain qui, de son côté, ne manque pas de lui témoigner son affection. Quatre ans plus tard, McGinniss publie son livre. MacDonald y est dépeint sous les traits d’un meurtrier psychopathe. Stupéfait, ce dernier décide d’intenter un procès à l’écrivain-journaliste.
Janet Malcolm nous plonge au cœur de cette folle histoire et s’interroge sur l’écriture, la trahison et la complexité des rapports entre l’auteur et son « sujet ». Son récit nous conduit notamment à De sang-froid, le chef-d’œuvre de Truman Capote. Considéré outre-Atlantique comme un classique, Le Journaliste et l’assassin est classé parmi les cent plus grands ouvrages de non-fiction de la Modern Library (Random House).
Quatrième de couverture par l’éditeur François Bourin.
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Ouvrage très intéressant sur l’éthique dans le journalisme, Janet Malcolm profite d’une affaire pour reposer une question encore sans réponse : un journaliste peut-il abuser de la confiance du pire criminel pour lui soutirer des informations ? Pour beaucoup, le journaliste n’a pas à rougir de honte pour avoir manipulé un pervers narcissique, un violeur ou un meurtrier sans sentiments. Mais pour beaucoup d’autres, un criminel un être humain, emprisonné pour être puni et qui n’a pas à subir d’outrages supplémentaires.
Janet Malcolm ne tranchera pas dans ce débat : ce sera à vous de faire votre propre avis à la fin de votre lecture grâce à l’exemple qui a déchiré l’ex-militaire Jeffrey MacDonald et le journaliste Joe McGinniss.
Jeffrey MacDonald est accusé d’avoir tué un soir ses deux fillettes et sa jeune épouse enceinte. Le tableau émeut et fait du criminel un père indigne, un mari violent et un monstre de sang-froid. Mais l’affaire n’est pas simple et MacDonal, encore aujourd’hui, affirme son innocence malgré un comportement étrange.
Il veut raconter son histoire et il trouve pour porte-parole Joe McGinniss, un journaliste qui a quelques livres témoignages à son actif et qui semble être le seul à pouvoir faire entendre sa version, de plus, les ventes auraient financé sa défense.
Une amitié est entamée entre les deux hommes : MacDonald se livre totalement car, comme le dit Janet Malcolm, les personnages principaux des non-fictions sont bavards, incorrigiblement bavards. En tant que journaliste, McGinniss recueille, enregistre, répertorie et construit alors sa matrice pour son livre Fatal Vision.
McGinniss garde secrète la rédaction de son œuvre, n’en dit rien à MacDonald : l’ancien militaire ignore que son ami dresse en fait un portrait peu flatteur. Au moment de la publication, c’est la douche froide : MacDonald est dépeint comme un odieux personnage et coupable en plus de ça ! Fatal Vision donne une série-télé et MacDonald est aussi glaçant qu’un Hannibal Lecter.
Son combat tombe à l’eau et il traîne McGinniss au tribunal pour mensonges et abus de confiance.
Janet Malcolm est également journaliste et ce n’est pas la petite scribouillarde au style plat : elle maîtrise les mots et Le Journaliste et l’assassin est un essai qui flirte avec le romanesque. Lire ce livre est plaisant car elle y met les formes comme une histoire tout en n’oubliant pas la réalité de la situation : Malcolm entraîne dans une réflexion bien articulée et intelligente.
Plus que tout, j’ai apprécié son ironie : des pointes régulières qui pimentent cette affaire et illustrent parfaitement les propos que Malcolm avance.
« À l’instar des jeunes hommes et femmes aztèques choisis pour le sacrifice qui vivaient dans la facilité et le luxe jusqu’au jour fatidique où on leur arrachait le cœur, les sujets d’un article ou d’un livre savent parfaitement ce qui les attend quand les jours fastes du vin et de la rose – la période des interviews – auront pris fin. Et malgré cela, ils disent encore oui lorsqu’un journaliste appelle, et malgré cela, ils ne manquent jamais d’être surpris par l’éclair du couteau. »
P. 188
Un livre très intéressant qui n’impose pas de point de vue : Le Journal et l’assassin apporte des faits sur le journalisme, le milieu judiciaire, les secrets des interviews et surtout l’éthique dans le métier de journaliste de fait-divers.
Quelques anecdotes sur ce bouquin,
• Discret en France, ce fait-divers a pourtant été un véritable phénomène aux États-Unis.
• NOTE : Toutes les chroniques de livres en rapport avec la Psychologie ou la Criminologie se trouve dans l'onglet "Bouts de Papier".
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