lundi 12 mars 2018

Héloïse, ouille !, de Jean Teulé,

Jean Teulé revisite les amours tumultueuses d’Héloïse et Abélard dans une version d’une modernité ébouriffante.
À la fin de sa vie, Abélard écrivait à Héloïse : « Tu sais à quelles abjections ma luxure d’alors a conduit nos corps au point qu’aucun respect de la décence ou de Dieu ne me retirait de ce bourbier et que quand, même si ce n’était pas très souvent, tu hésitais, tu tentais de me dissuader, je profitais de ta faiblesse et te contraignais à consentir par des coups. Car je t’étais lié par une appétence si ardente que je faisais passer bien avant Dieu les misérables voluptés si obscènes que j’aurais honte aujourd’hui de nommer. »
Depuis quand ne peut-on pas nommer les choses ?
Jean Teulé s’y emploie avec gourmandise.
Quatrième de couverture depuis LivrAddict.
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Abélard et son élève Héloïse (1882),
par Edmund Blair Leighton
Même si j’ignore les détails, j’ai toujours été fascinée par l’histoire d’amour, devenue légende, d’Héloïse et du moine Abélard. J’ai toujours aimé les romances qui incluent des personnages religieux car la tentation et la religion peuvent apporter une dimension très humaine.
Mais enfin, ce n’est pas avec Héloïse, ouille ! que cette faiblesse a été comblée : Héloïse, ouille !, c’est lire une slash fiction, un porno littéraire sur ce couple populaire.

Je connais un peu le style de Teulé et pourtant, je ne m’attendais pas à un tel début : la première partie est composée, voire saturée, de cul. Les scènes pornographiques se succèdent avec beaucoup de détails et Jean Teulé semble avoir potassé le Kâma-Sûtra avant l’écriture de son roman.
J’ai accepté de continuer la lecture comme lorsque je regarde un nanar qui s’assume : cette romance ne fait pas particulièrement rêver et tombe dans le burlesque, le ridicule. Plutôt que d’exciter, ces scènes poussent même à rire !
Et cet humour très spécial se retrouve jusqu’à la fin et il m’aurait lassé si les personnages n’évoluaient pas : Jean Teulé suit quand même les grandes lignes historiques et évoque des évènements connus. Abélard, après avoir perdu ses parties génitales, revient à une foi plus sérieuse tandis qu’Héloïse est insensible à la honte, restant une femme amoureuse et forte.

C’est peut-être ce qui m’a plu dans Héloïse, ouille !, cette fameuse Héloïse : un peu (trop) naïve au début, vieillit en se forgeant un caractère fort et espiègle. Elle possède un charme particulier et j’ai aimé ses réflexions nonchalantes. C’est sûrement cette évolution qui a sauvé un peu mon ressenti.

Si vous commencez Héloïse, ouille !, ne vous attendez pas à une romance avec de belles scènes courtoises, prenez le roman pour ce qu’il est : une histoire à ne pas prendre au sérieux, qui verse dans le burlesque et ne connaît pas la décence. De quoi passer un moment comique même si je ne le conseille pas tellement, ayant conscience que cet humour et ce style peut fatiguer, voire agacer.

Héloïse et Abélard (1919) par Eleanor Fortescue Brickdal,
qui a servi à la couverture

             Quelques anecdotes sur ce bouquin,
• L’édition Audiolib termine avec un entretien avec l’auteur très intéressant : cela permet d’apprendre que Jean Teulé a voulu populariser le couple mythique après s’être rendu compte que personne ne connaissait vraiment Héloïse et Abélard.

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