samedi 25 avril 2015

Mrs Dalloway, de Virginia Woolf,

Le roman, publié en 1925, raconte la journée d’une femme élégante de Londres, en mêlant impressions présentes et souvenirs, personnages surgis du passé, comme un ancien amour, ou membres de sa famille et de son entourage. Ce grand monologue intérieur exprime la difficulté de relier soi et les autres, le présent et le passé, le langage et le silence, le mouvement et l’immobilité. La qualité la plus importante du livre est d’être un roman poétique, porté par la musique d’une phrase chantante et comme ailée. Les impressions y deviennent des aventures. C’est pourquoi c’est peut-être le chef-d’œuvre de l’auteur - la plus grande romancière anglaise du XXe siècle.
Quatrième de couverture par Folio Classique.
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« […] des moments comme celui-ci sont des bourgeons sur l’arbre de la vie ; ce sont des fleurs de l’ombre. » 
P. 96 - 97

Il y a déjà bien longtemps que je veux découvrir Virginia Woolf, une auteure particulièrement connue pour son fatalisme, son talent pour user des mots et son suicide dans la rivière qui coulait derrière sa demeure. Je me doutais que Mrs Dalloway serait une lecture étrange, un livre qui ne me rappellerait aucune autre lecture passée et j’ai eu beaucoup de mal à avancer : ce livre me déprimait et pourtant, il m’apportait aussi beaucoup d’espoir à travers sa beauté. Finalement, c’est ça de rencontrer Virginia Woolf.

Combien de phrases ont marqué mon esprit, me blessant et me laissant béate d’admiration face à la justesse des métaphores, des expériences de la vie et de la musique des mots. Je ne me demande pas pourquoi Virginia Woolf est une auteure tant analysée, étudiée et acclamée par les littéraires car la dame avait bel et bien du talent, c’est indéniable.

Jane X de Sir Gerald Festus Kelly.
« […] qui laissait, se disait-elle, se sentant soudain fanée, vieillie, la poitrine creuse, pénétrer la journée qui s’émiettait, qui s’éventait, qui fleurissait, dehors, par la fenêtre, s’échappant de son corps et sa cervelle qui lui faisaient soudain défaut, […] » 
P. 99

Pourtant, je ne peux pas accorder une note plus avantage pour l’œuvre bien connue de Mrs Dalloway. Non pas que le livre sera oublié (habituellement, les 3/5 sont accordés aux livres sympathiques mais qui ne me laisseront pas un souvenir impérissable), c’est plus par désarroi : je ne peux pas noter ce livre. Et on ne peut pas noter Mrs Dalloway selon des critères classiques : l’histoire reste commune, les personnages sont simples mais réels. On les rencontre un matin et on les quitte le soir venu, et durant cette journée londonienne, on vole d’un point-de-vue à un autre. Ironiquement, je n’arrive pas à m’attacher aux personnages quand ils ne sont pas assez creusés (hein, Fiona McIntosh avec Le Don ?) mais ici, leur psychologie est trop mise à nu, trop exploitée et trop réelle et je n’ai pas réussi à être véritablement transportée. Peut-être parce que Clarissa Dalloway, Septimus Smith, Peter Walsh, Lucrezia Smith et tant d’autres sont trop humains et que connaître les pensées les plus torturées, les plus intimes de quelqu’un ne le rend certainement pas plus amical, bien que je ne les détestais pas non plus, loin de là !
J’avais même du mal à suivre le fil et par moment, j’avais clairement l’impression de lire à côté, comme si je décrochais.

Mais il faut lire Mrs Dalloway pour lire du Virginia Woolf, lire son talent et s’apercevoir comment elle donne vie aux phrases. Depuis quelques mois, j’ai adopté une habitude livresque de Flora, tenancière d’Une Page s’Ouvre (quoi ? C’est mignon, dit comme ça), qui note un petit cœur dans la marge quand une phrase ressort lors d’une lecture… Et même si j’ai lu bien des livres qui m’ont émue, Mrs Dalloway est la première lecture depuis que je note ces petits cœurs comblés et une bonne quinzaine se sont accumulés parmi ces 300 pages. 

Une lecture très compliquée mais une rencontre très marquante avec une dame que j’admirais déjà pour sa vie et sa sensibilité évidente. Virginia Woolf est définitivement une grande auteure et malgré mon ressenti peu enthousiaste avec Mrs Dalloway, je suis certaine de lire d’autres ouvrages : il faut juste que le sentiment déprimé qui me colle depuis l’histoire de Clarissa Dalloway s’estompe et je me lancerai de nouveau dans une après-midi Woolfienne.
« [...] Il le savait bien ; il l’avait inventée, cette aventure avec la jeune femme ; il l’avait fabriquée, comme on se fabrique les trois quarts de sa vie, se dit-il, et comme on se fabrique soi-même. » 
P. 131

             Quelques anecdotes sur ce bouquin,
[Danger de spoil !] Virginia Woolf avait toujours prévu un suicide à la fin de Mrs Dalloway mais c’était Clarissa qui devait se donner la mort et non Septimus Smith. [/Fin de danger de spoil !]
• Tout d’abord intitulé The Hours, Woolf a finalement nommé son livre Mrs Dalloway et ce premier titre a été recyclé par l’auteur Michael Cunningham : son livre The Hours parle de trois femmes, Virginia Woolf incluse, qui sont rattachées d’une façon ou d’une autre à l’histoire de Clarissa Dalloway et en s’appuyant sur les notes authentiques de Woolf. Ce livre a connu une chouette adaptation en 2002 et garde le même titre.


1 commentaire:

  1. Mouhahaha, j'aime beaucoup "tenancière" ! Comme je suis contente que tu aies repris la méthode des p'tits coeurs ! C'est bien pratique et c'est chouette quand tu rouvres le bouquin, ça fait remonter plein de souvenirs.
    Bon, pour parler du bouquin qui me mène ici, je dois avouer que j'ai Mrs Dalloway dans ma bibliothèque depuis... heu, je ne sais même plus combien d'années mais j'ai peur de me lancer. J'ai déjà lu pas mal de nouvelles de Woolf et ça m'avait sacrément déprimée donc bon. Va falloir que je me prépare psychologiquement.

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